Chapitre 10

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Je raccroche et reprends mon petit-déjeuner ou mon repas. Ne voyant pas les mains de mon partenaire bougées, je lève la tête vers lui. Il me regarde d'un air sérieux.

- C'est vrai que tu souris plus quand tu es avec moi ?

Je hoche la tête. Pourquoi me pose-t-il cette question, mais surtout pourquoi ai-je dit ça ? Il pose sa joue dans sa main et reprend :

- C'est vrai que j'ai remarqué que quand ta mère est là, tu ne souris pas, tu ne parles pas et ton visage est complètement fermé... Que t'est-il arrivé plus jeune ?

Je soupire, pourquoi s'obstine-t-il ? Je déteste le fait qu'il insiste autant. Je trouve ça énervant et pesant. Je pose mes couverts sur la table et essuie mes lèvres. Je me redresse et lui demande :

- Bon, qu'est-ce que tu veux à la fin ?

- Parle-moi de toi !

- Je t'ai déjà dit ce qu'il y avait d'intéressant.

- Non, il n'y a pas que ça.

- Alors quoi ! m'exclamé-je. Tu veux que je te dise quoi ? Que j'ai une vie de merde ? Que je n'ai jamais eu d'amis ? Que j'étais harcelée tout le long de ma scolarité ? Que ma mère me déteste et me fait la misère depuis toute petite ? Que j'ai pensé à me suicider plusieurs fois, mais que je n'ai jamais eu le cran de le faire parce que je suis une putain de lâche ? C'est ça que tu veux savoir et que tu cherches tant à savoir ? Bah voilà, tu le sais maintenant !

Je balance ma serviette sur lui et prends mon sac. Je laisse le téléphone sur la table et je sors du restaurant. J'ai besoin d'air. Devoir reparler de ses souvenirs me rappelle combien je suis une personne faible et c'est ce que j'essaie d'éviter, être faible. J'en ai marre de me faire marcher sur les pieds et c'est pour ça que je me suis promis de ne plus jamais pleurer. Auparavant, je pleurais constamment devant mes persécuteurs. Ils savaient que ce qu'ils me faisaient m'atteignait et je ne veux plus montrer mes faiblesses.

Je l'entends crier mon nom au loin. Je distingue de mieux en mieux sa voix grave et cassée, signe qu'il se rapproche. Il me retient par le poignet et me tourne vers lui puis me prend dans ses bras. Je tente de me dégager, mais il resserre son étreinte.

- Excuse-moi, Khlayne, commence-t-il. Je t'ai déjà dit que je manque de tact parfois et je n'aurais pas dû te brusquer. C'est vrai que je suis curieux, voire trop, mais je pense que parler est mieux que de tout garder pour soi. Je sais qu'on ne se connaît pas depuis longtemps et que tu ne me fais pas suffisamment confiance, mais si tu as besoin de parler, je suis là. Tu as besoin de temps pour t'exprimer, j'ai compris, mais tu ne réalises pas à quel point ça te détruit à petit feu. Tu ne te rends pas compte à quel point tu es différente en présence de ta mère, mais ça fait peur...

Je ne sais pas trop comment réagir. Sourire ou pleurer ? Non ! Surtout pas pleurer ! Même si ça me touche et que ça me fait plaisir, je ne dois pas pleurer. Pour la première fois de ma vie, j'espère enfin m'en sortir et peut-être qu'il va m'aider. Il a sûrement raison, non pas sûrement. Il a raison ! Je dois parler, mais je ne suis pas encore prête. Suis-je si différente que ça ? J'en ai marre de réfléchir.

Je place mes bras autour de sa taille avec beaucoup d'hésitation. Je suis maladroite dans mes mouvements, mais c'est sincère. Ça fait du bien de ne pas se sentir en danger auprès de quelqu'un pour une fois. C'est un sentiment à la fois étrange et agréable. C'est tellement dur quand on a constamment été déçu dans sa vie.

Je le repousse doucement, trouvant que notre proximité a assez duré et je me mets dos à lui, sentant les larmes monter. Je lève les yeux au ciel pour les empêcher de couler.

Why me ? Tome 1 (réécriture en cours)Where stories live. Discover now