Chapitre 39 Fuite

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Je sortis du gymnase en courant, après avoir récupéré mon sac dans les vestiaires puis traversai toute la cour jusqu'à la forêt derrière l'école. Je filais comme une flèche au milieu des arbres, en pleurant sans trébucher, mais dû m'arrêter quand j'atteignis le mur d'enceinte. J'étais en nage, essoufflée et tremblante, pourtant je ne pouvais pas rester là. L'idée de le recroiser me brisait et il fallait que je quitte les lieux maintenant ! Sans hésiter, je posai la main sur le mur et écartai les pierres avec mon pouvoir, déplaçant leurs atomes suffisamment pour que je m'y glisse de côté, avant de les laisser se reconstituer. J'étais enfin dehors ! Pour la première fois depuis mon arrivée, je désobéissais à mon obligation de rester dans l'enceinte de l'école pour regagner une liberté trop chèrement payée. Je marchais pour rejoindre le centre ville pendant deux heures, et trouvais un hôtel où passer la nuit, puisqu'elle était tombée. Malgré la fatigue, je ne m'endormis que très tard dans la soirée, ressassant tout ce qui venait de se passer encore et encore. 

Je passais ma journée du lendemain à errer dans Tokyo, me sentant plus seule que jamais entourée de tant de monde. Mes pas me conduisirent dans un centre commercial, où je restais tout l'après midi, flânant entre les rayons pour essayer d'oublier la douleur dans ma poitrine. Quand elle se faisait insupportable, je m'asseyais un moment pour respirer, et grognais sur tous les mecs tentant de m'aborder. Mes émotions tourbillonnaient en un magma désastreux et je sentais qu'il me fallait quitter les lieux, au risque de créer un incident bien plus grave que celui qui avait coûté la vie à mes collègues. Je me perdis dans les allées sombres en cherchant la sortie, et découvris que les fléaux pullulaient aussi dans ces recoins là. Je libérais un peu de mon énergie pour les éliminer histoire de me calmer et faire quelque chose d'utile, et repris mon errance. Je marchais au hasard dans des ruelles, à peine consciente de mon environnement, et le paysage changea sans que je m'en rende compte : j'étais sortie du cœur de la ville pour finir dans un quartier plus résidentiel, très calme. Un parc au loin m'attira, et j'allai me poser sur la balançoire délaissée, alors que le soir tombait. Je ne savais pas où dormir, ni quoi faire.. alors, je fis de la balançoire à la place. Sentir le vent dans mes cheveux courts était agréable, et pendant un instant, j'oubliais tout pour redevenir une enfant. Ce fut de courte durée, et le retour à la réalité me fit mal : je terminais par sangloter pathétiquement, mes pieds crissant dans les graviers parce que le balancement ralentissait peu à peu.

Que faire maintenant ? 

J'avais blessé un exorciste dans le cadre de l'école, pour aucune raison valable, et alors que je pensais contrôler mon pouvoir. J'avais enfin repris confiance en moi et elle venait de s'écrouler.  Malgré toutes les épreuves, les batailles gagnées de justesse et le lourd poids psychologique, la malédiction ajoutée par dessus qui en était surement responsable d'ailleurs.. malgré tout ceci, je n'avais pas réussi à me contrôler parfaitement, alors que c'était la condition sine qua none de ma survie. 

En discutant avec Yuta, j'avais d'ailleurs découvert que nos situations n'étaient pas si proches que ça, et que je comprenais pourquoi ils avaient tout fait pour cacher mon existence. Il avait blessé gravement des camarades de classe, mais contrairement à moi, n'avait tué personne ! Et pourtant, à cause de Rika, son fléau terrifiant, les hauts gradés des exorcistes avaient demandé son exécution immédiate, auquel Gojo s'était opposé. Je comprenais à présent tous les risques qu'ils avaient pris en me protégeant, alors que rien ne leur prouvait que ce n'était pas une erreur qui leur coûterait cher à l'avenir. Erreur que je venais de faire. 

Tout ceci était la partie rationnelle de mon raisonnement, celle qui me faisait culpabiliser parce que mes actions avaient des conséquences pas uniquement pour moi, mais aussi pour les gens qui m'avaient protégée. C'était dur à digérer, mais au fond de moi, je pensais encore pouvoir me racheter. 

Seule reste la poussière (OC X Nanami Kento, "Je")Où les histoires vivent. Découvrez maintenant