Chapitre 6 : dernière chance avant l'endettement

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 Après le retour mouvementé chez eux et quelques jours de repos, l'heure des comptes était arrivé. Si la question du loyer était souvent évoquée, ici tous, même Elyazra, se rendirent compte qu'il devenait urgent de regagner un peu d'argent. Avec ce qu'ils avaient, ils pouvaient encore payer un mois, mais même en se serrant la ceinture le deuxième poserait problème.

Pour des personnes normales, cela n'aurait pas posé de problème et aurait laissé un mois entier pour se refaire, mais la close spécial si l'entièreté des revenus venait de missions pour mage était de vigueur ici. Celle-ci était un arrangement qui permettait aux mages de partir sereinement sans avoir à se dire qu'ils devaient rentrer tous les mois pour verser le loyer. De même, le propriétaire n'avait pas à s'en faire non plus pour les mêmes raisons.

À cause de cette clause, ça n'était pas un mois qu'ils devaient débourser, mais trois. Il ne leur restait donc que deux semaines pour trouver de quoi payer deux mois de loyer. Vu qu'il n'y avait plus de temps à perdre, toute l'équipe se rendit au Hall des musiciens en quête d'une mission bien payée et assez courte pour qu'ils aient le temps de l'accomplir et de revenir avant la date limite.

Chacun s'était réparti pour couvrir le plus de terrain possible, seul Rael avait décidé de ne pas en faire de même et s'était plutôt rendu à un guichet pour voir s'ils n'avaient pas quelque chose à leur proposer qui n'était pas affiché.

Syara avait déjà balayé tout un pan de mur qui ne correspondait pas à ce qu'ils cherchaient lorsque l'elfe revint vers elle avec une mine inquiète qui ne lui disait rien qui vaille.

— Il faut absolument que la prochaine mission se déroule sans accroc, annonça-t-il de but en blanc.

— Oui, je sais, mais pourquoi tu me dis ça ? Tu as l'air d'avoir appris une mauvaise nouvelle.

— Avec les dernières missions échouées ou réussies mais où le client est tout de même mécontent, nous sommes tous les deux sur le point d'être rétrogradés.

— Et alors ? On s'en fiche de ça. Je ne sais même pas quel rang je suis.

— C'est plus grave que tu ne le penses. Un échec de mission, ça apparaît dans un dossier interne qui n'est consultable que par ceux qui gèrent les halls. Une rétrogradation, ça apparaît sur les fiches qu'ils présentent aux clients pour qu'ils déterminent si oui ou non ils acceptent que la mission soit effectuée par nous. Ça a un réel impact qui peut faire que nous ne trouverons plus de missions intéressantes jusqu'à ce que la note de rétrogradation disparaisse de nos fiches.

— Et ça met combien de temps ?

— A moins de réussir à regagner le rang perdu grâce à des missions intéressantes, chose qui, comme je l'ai dit, est difficile à obtenir, ils l'enlèvent au bout d'un an.

— Un an ? Autant nous dire que si ça arrive, on sera bon pour trouver un autre travail plus stable si on veut garder la maison. Mais ne t'en fais pas, je crois que je viens de trouver la mission salvatrice.

Décrochant une annonce sur le mur, Syara la montra au mage de vent. Il s'agissait d'une mission d'escorte de caravane marchande, tout ce qu'il y avait de plus basique. Ils demandaient un groupe ayant une petite expérience de combat sans pour autant qu'ils soient des experts absolus. La caravane partait dans deux jours pour un voyage de trois. Ils restaient ensuite deux jours sur le lieu de la destination puis repartaient pour Léfarène.

Cette mission rentrait dans les temps, la récompense était alléchante et ils n'avaient rien à dépenser pendant toute la durée vu que couchage et repas étaient offerts.

— Avec une escorte il y aura peu de chances de décevoir le client.

— Tu es sûre de toi ?

— Nous devrons protéger, pas transporter, donc la maladresse de Phi ne sera pas un problème. Elyazra est tout de même assez lucide pour faire attention aux clients et à la marchandise quand elle se bat tant qu'ils n'ont pas tout étalé par terre. Guard a une certaine expérience avec le banditisme et saura détecter les endroits propices à une embuscade... Quant à moi, si mes pouvoirs ne reviennent pas, on échangera nos rôles avec Ely. Elle lancera les sorts et je lui emprunterai sa rapière.

— Et moi dans tout ça ?

— Toi tu complètes parfaitement l'expertise de Guard. Avec tes sorts de vent tu pourras ressentir les mouvements suspects avant que ça nous tombe dessus. Et ça, c'est autant valable pour les bandits que pour les bêtes sauvages.

— En effet, vu comment tu le décris, cette mission a l'air parfaite pour nous. Allons prévenir tout le monde.

Après avoir fait le tour du hall pour réunir l'équipe et leur avoir exposé la découverte de Syara, tous furent emballés pour partir sur cette mission. Ils se rendirent donc jusqu'à un guichet et présentèrent l'affiche pour être inscrits comme prenant cette demande. Lorsque vint le moment de donner l'identité de tout le monde, quelque chose sembla faire hésiter la personne en charge de remplir les formulaires.

Était-ce à cause de Phi. Il était vrai que la présence d'une adolescente pouvait interroger, surtout que ça ne devait sans doute pas être autorisé. Cependant ça n'avait pas posé de problème jusque-là, alors pourquoi maintenant ?

— Je reviens, annonça le guichetier avant de partir dans une arrière-salle.

— Qu'est-ce qu'il lui prend ?

— S'il nous dit qu'on ne peut pas prendre cette mission, je crame tout, s'exclama Elyazra.

— Doucement sur les menaces pyromanes, la tempéra Guard. S'il y a bien un endroit où il faut se tenir à carreau, c'est ici. Je te rappelle que nous sommes entourés de mages.

— Et alors ? Qu'ils viennent, je les prend tous un par un !

— Justement... S'ils viennent, ça ne sera pas un par un, souffla Syara. Tu te vois tous les affronter en même temps ?

— Même pas peur ! Répondit-elle avec un sourire confiant et triomphal.

Heureusement, ça n'était pas les originaux qui manquaient en ce lieu, si bien que personne ne prêtait réellement attention aux inepties que la demie-dragonne proférait. Certains s'en amusaient et la beast entendit même deux anciens mages parler de la fougue de la jeunesse et du fait qu'ils étaient pareils au même age.

Après encore un léger temps d'attente, le guichetier revint vers eux et se réinstalla à sa place. S'il était parti avec uniquement le formulaire, il était clair qu'il tenait à présent un autre papier en plus dans ses mains.

— C'est bien ce qu'il me semblait. Une demande nous a été faite récemment.

— Une demande ?

— Oui, ou plutôt une mission où il a été expressément demandé que ce soit vous qui l'accomplissiez.

— Nous... L'un de nous ou...

— Tous vos noms sont cités à l'exception de celui de la jeune fille, répondit-il.  

Le violon de cristal : l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant