Chapitre 62 : bilan de la soirée

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 — C'était d'un ennui ! s'exclama Elyazra en se jetant sur son lit.

— Tu aurais préféré quoi ? Questionna sa sœur. Qu'ils campent sur leur position et que nous soyons obligé d'organiser une retraite pour ramener Sae chez elle ?

— Non, pas à ce point, mais j'aurai quand même aimé qu'il y ait un peu plus d'action, que je me sente un peu utile ! Toi tu as mené toute la discussion jusqu'à l'arrivée de Sae, Phi l'a protégée, Rael et Guard ont activement participé au débat et moi j'ai servi de plante verte !

— Rael dirait sans aucun doute que tu fais une magnifique plante verte, rit Syara.

— C'est ça, fou toi de moi. Il n'empêche que même Rix et Risha ont été plus utiles en apportant leur témoignage de simple harpie qui veut la paix.

Il était normal que les sœurs de Sae soient plus impliquées. Après tout, il s'agissait de l'avenir de leur peuple dont il était question. Elyazra avait beau se plaindre, son rôle était primordial dans les scénarios défaitistes. Le fait qu'elle n'ait pas eu à intervenir était une bonne nouvelle et, si cette soirée ne s'était pas terminée en prenant le meilleur chemin possible, celui que les discussions avaient prises était plus que satisfaisant.

Bien sûr, rien n'avait été signé pendant ce dîner. L'objectif n'était pas d'obtenir la paix le soir même, mais de convaincre les dirigeants qu'il existait une voie, portée par les harpies, qui allait dans ce sens. Une promesse fut tout de même faite pour que toutes les requêtes d'extermination de harpies soient retirées des différents halls des musiciens du pays. Même s'ils ne pouvaient rien faire pour le reste du monde, cette avancée était déjà une victoire.

Avant d'entamer quoi que ce soit, il avait donc été décidé que certains des dirigeants se rendrait sur le plateau des chaînes d'Hara pour vérifier la véracité de ce qui avait été dit. La suite se ferait par voix politique, officielle cette fois-ci.

— Dis, ils ne vont pas nous la faire à l'envers hein ? s'inquiéta la dragonne.

— Je ne pense pas. Le témoignage des sœurs de Sae montre bien qu'il y a une différence fondamentale entre les anciennes impératrices et la nouvelle. Là où elles se retiraient à la mort de l'impératrice, retrouvant leur libre-arbitre et perdant tout envie de se battre, l'assassinat de la seule pacifiste qui respecte leur libre-arbitre les ferait déferler sur le monde avec un puissant sentiment de vengeance.

— C'est aussi la conclusion que j'ai tirée en discutant avec certaines d'entre elles dans la grotte avant notre départ. J'avais le sentiment que ça n'était pas le contrôle passif qui parlait, mais bien leurs propres sentiments.

— Cela faisait déjà plusieurs mois qu'elle était devenue impératrice. Elles ont dû se rendre compte que la vie était tout de même plus plaisante sans les guerres de clans qui sévissaient.

— Dans tous les cas, s'ils s'en prennent à Sae, la déferlante de harpies sera le cadet de leurs soucis.

— Elyazra la calamité, rit la violoniste.

— Entre mon père qui a attaqué Sendra et notre mère qui était une psychopathe en puissance, j'ai ça dans le sang, s'esclaffa la demie-dragonne. Enfin bon, pour l'instant ils se sont tenus tranquilles et moi je n'ai pas sommeil, j'ai besoin de me dépenser !

— Tu vas rendre visite à Rael ? Demanda sa sœur avec un sourire en coin.

— Je pensais plutôt à sortir en ville. Après tout, c'est la fête absolument partout là-bas.

— Vu que nos finances vont aller beaucoup mieux, je ne vais pas te dire de ne pas trop dépenser, mais fait attention à toi quand même.

— Allons, tu me connais. Je fais toujours attention.

À ces mots, Elyazra se releva du lit et sortit de la chambre. D'ailleurs, que faisait-elle là à la base ? Chacun avait sa propre chambre alors pourquoi était-elle venue dans la sienne ? Ce devait sans doute être ce sentiment d'inutilité qui l'avait poussée à se livrer ainsi. En somme, bien qu'il arrivait qu'elles se disputent, Syara ne put que constater qu'elles se comportaient de plus en plus comme de véritables sœurs.

S'allongeant un instant sur son lit, la violoniste se rendit compte qu'elle n'avait pas non plus sommeil. Ça n'était pas au point de vouloir faire la fête, mais elle avait tout de même envie de discuter de tout ce qui s'était passé avec la principale intéressée.

La beast sortit donc à son tour de sa chambre et alla frapper à la porte de celle de Sae. Une fois invitée à entrer, elle découvrit que la jeune harpie n'était pas seule, mais en compagnie de Phi. Ces deux-là s'entendaient définitivement à merveille et la violoniste avait hâte que les harpies puissent se rendre dans les villes pour qu'elle passe par chez eux.

— Je ne vous dérange pas ?

— Pas du tout, entre ! J'étais en train de remercier encore une fois Phi pour le sacrifice qu'elle a fait pour moi et mon peuple.

— Le sacrifice ? s'étonna Syara.

— Oui. Elle a révélé ce qu'elle était vraiment et par la même occasion l'existence de son peuple alors qu'ils s'étaient toujours cachés, même des humains lorsqu'ils étaient seuls sur ce monde. J'espère sincèrement que cela ne leur portera pas préjudice.

— Nous n'avons pas révélé l'endroit où elles vivent toutes et je sais qu'elles ont de quoi se défendre. Et pour Phi, ceux qui tenteraient de s'en prendre à elle ne savent pas à quel danger ils s'exposent ou exposent le monde. De toute façon, la liste des personnes qui ont connaissance de sa véritable nature reste assez restreinte. Si cela venait à s'ébruiter, retrouver le coupable serait assez simple.

— C'est ce que je lui ai dit, sourit la fée. D'ailleurs, s'il n'y avait pas cette histoire de potion d'immortalité, l'existence de mon peuple pourrait aussi être révélée au grand jour.

— Ce pourrait être un projet futur, mais de ce que j'ai vu, ton peuple semblait heureux sur ses terres et ne semblait pas vraiment du genre à vouloir partir explorer le monde. Ne risquons pas leur sécurité si cela ne leur apporte rien. Et au pire, pour ceux ayant soif d'aventure, tu pourras leur apprendre à développer une forme humaine. Mais pour le moment, occupons nous d'abord des harpies. Es-tu satisfaite de cette soirée ?

— J'ai essayé de ne pas le montrer, mais j'étais terrifiée lorsqu'ils m'ont attaquée, répondit l'impératrice. Malgré tout, ça en valait la peine. Je pense qu'ils ont été convaincus que j'étais sincère dans ma demande. J'ai hâte qu'ils nous rendent visite chez nous et que tout ce dont on a parlé se concrétise. Pourriez-vous rester avec moi jusque-là ? Je vous remettrai votre récompense après leur visite.

— Je pense effectivement qu'une protection rapprochée ne sera plus aussi nécessaire une fois chez toi et que surveiller si quelque chose de suspect arrive dans les villes sera plus utile. Nous resterons pendant la visite officielle des émissaires, puis nous nous retirerons, mais si tu as le moindre problème, n'hésite surtout pas à nous le dire et nous accourrons.

Continuant la discussion jusqu'à tard dans la nuit, Syara, Sae et Phi reprirent ce qu'elles avaient déjà prévu dans la suite des événements. Une bonne partie fut consacrée à la problématique d'entrer rapidement en contact avec le groupe, mais Syara ne se faisait pas trop de soucis. La magie sous forme d'enchantement faisait des merveilles et elle était certaine qu'ils pourraient trouver une solution en l'utilisant.   

Le violon de cristal : l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant