Chapitre 134 : Premier combat dans l'autre monde

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 — Vous comptez résister ? C'est une trahison envers le roi ! Cracha le recruteur.

— Mais oui, c'est ça, on lui dira ! Répondit Elyazra en s'avançant. Petite sœur, tu viens t'amuser avec moi ?

— Tu sais bien que je ne peux pas, souffla la beast qui avait pourtant envie de les remettre à leur place.

— Comme tu veux. Phi, pas la peine de demander, je connais déjà la réponse. Elirielle ?

— C'est bien, vas-y, donne nos noms, ça sera plus simple pour eux de faire des avis de recherche, râla la dragonne. Je passe mon tour aussi, mais tu as intérêt à les assommer assez fort pour qu'ils oublient tout de cette journée.

— C'était bien mon intention, sourit la demie-dragonne. Et vous les garçons ?

— J'ai un mauvais pressentiment, je vais rester en arrière pour le moment, répondit Élane.

— Ce sera donc du deux contre quarte ! Annonça Orélius en s'avançant au niveau de sa cousine.

— Super ! On fait comme à l'entraînement ?

— Tu veux dire que tu fonces dans le tas et je m'adapte tant bien que mal ?

— Exactement !

— Aux armes ! Tuez ces traîtres ! Hurla le recruteur.

Voyant que la situation s'envenimait, les quelques habitants encore présents s'écartèrent aussi vite qu'ils le pouvaient et se mirent à l'abri. Du côté des soldats, deux d'entre eux avaient invoqué une lance et un troisième une lourde hache de guerre. Le recruteur, lui, s'était muni d'une épée courte tout ce qu'il y avait de plus banale.

En réponse à cela, Elyazra dégaina sa rapière alors que son cousin levait sa garde, plus habitué à se battre avec ses poings qu'avec une arme. Ces gestes provoquèrent un rire de dédain de la part du recruteur. Pour lui, une arme qui n'était pas invoquée ne devait être qu'un jouet facile à briser. Il se voyait déjà victorieux face à cette pauvre femme sans pouvoir et, qui plus est, blessée et incapable de voler.

Ce comportement hautain ne fut pas au goût de la principale intéressée qui choisit donc sa première victime. Avant qu'il n'ait fini de rire, Elyazra avait disparue dans des volutes de fumée noire pour réapparaître l'instant d'après juste en face de lui. N'étant même pas en garde, elle aurait pu le tuer instantanément en lui transperçant un organe vital ou même en le décapitant, chose qu'elle avait déjà prouvé savoir faire malgré son arme peu adaptée.

À la place, la demie-dragonne lui envoya un violent coup de coude dans le nez. Le craquement qui se fit entendre, même à la distance où se trouvait Syara, montrait bien la force qu'elle y avait mise. Le recruteur tomba en arrière et s'étala de tout son long deux mètres plus loin de la position où il s'était tenu.

Les deux lanciers furent les premiers à réagir et tentèrent, dans un mouvement parfaitement coordonné, de l'empaler en la prenant sur ses flancs. Leurs lames ne goûtèrent qu'à de la fumée noire et se croisèrent dans un bruit métallique à l'endroit où se trouvait le cœur de leur adversaire une fraction de seconde avant. Elyazra mettait simplement hors d'état de nuire, eux visaient pour tuer.

— Dis, tu comptes m'aider ? S'agaça-t-elle en réapparaissant à côté d'Orélius.

— J'ai dit que je m'adaptais. De ce que j'ai vu, tu n'avais pas besoin de mon aide. Si j'étais intervenu, tu m'aurais hurlé dessus et reproché que je te vole tes proies, répondit-il avec un haussement d'épaules.

— Tu me connais si bien, sourit-elle. Bon, je te laisse le bûcheron, moi je m'occupe des manieurs de cure-dent !

— Tu t'accapares donc trois proies et tu ne m'en laisses qu'une ?

— Si tu n'es pas content, je peux aussi m'occuper du tien !

— D'accord, d'accord ! Allez, vas t'amuser avec les deux qu'il te reste, souffla le demi-dragon.

À la manière d'une enfant à qui on lui aurait dit qu'elle pouvait aller jouer, Elyazra sautilla sur place, puis se téléporta de la même manière qu'elle l'avait fait la première fois. Ses adversaires l'avaient cependant déjà vu utiliser une telle technique et ne furent pas aussi surpris. Les lanciers s'étaient reculés à l'apparition des premières particules de fumée noire devant eux. La demie-dragonne était à peine apparue qu'une hache s'abattait déjà sur elle et menaçait de lui trancher le cou.

De la fumée blanche rehaussée de reflets dorés apparut cependant près d'elle avant que la lame ne la touche. Orélius s'était lui aussi transporté dans la mêlée et avait stoppé la hache à main nue. L'ange tenta d'abord de terminer son mouvement pour pourfendre cet autre adversaire, mais ne put progresser davantage. Il essaya ensuite de dégager sa lame des mains de son ennemi, sans plus de succès.

De leur côté, les deux lanciers s'étaient élevés dans les airs et se servaient de leurs armes comme des javelots qui auraient atteints Elyazra avec une précision meurtrière si ses réflexes n'étaient pas sur-humains. En représailles, la demie-dragonne tenta de leur faire un retour à l'envoyeur, mais vit les deux projectiles qu'elle avait récupéré disparaître de ses mains pour réapparaître dans celles des anges. De la même manière, l'adversaire d'Orélius, voyant qu'il ne pouvait récupérer son arme, la fit disparaître pour la faire revenir juste après.

— Ils n'usent pas de magie ? S'étonna Phi.

— Il est possible que leurs pouvoirs ne soient pas utiles en combat, supposa Élane. Ou bien ils commencent par jauger leur adversaire avant de s'en servir.

— Eh bien ils ont intérêt à vite la jauger, parce que s'ils ne donnent pas le meilleur d'eux-mêmes très bientôt, j'en connais une qui va s'impatienter, commenta Syara.

Si le combat était figé entre le manieur de hache et Orélius qui restaient à une distance respectable et ne faisaient que s'observer, Elyazra, elle, était bloquée sur le plancher des vaches et subissait une pluie de javelots. Dès que les anges voyaient que leur tire n'allait pas toucher la cible, ils ramenaient leurs armes à eux et les relançaient pour une nouvelle tentative. Ils étaient si rapides qu'ils donnaient l'impression de manier bien plus qu'une arme chacun. Malgré tout, aucun de leur tire n'arrivait ne serait-ce qu'à l'effleurer.

— Elle est impressionnante, souffla le fils du baron. Quand je pense qu'elle n'a pas arrêté de me demander de faire un combat amical depuis que nous sommes partis. Rien qu'à la voir se déplacer, je sais que je n'aurai eu aucune chance.

— Et encore, pour l'avoir entraînée, il est clair qu'elle ne fais que jouer avec eux ici, expliqua Elirielle. Elle a beau ne pas savoir voler, elle est loin d'être désarmée contre des adversaires qui ont cette faculté. Elle doit vouloir les pousser à bout pour qu'ils montrent vraiment ce dont ils sont capables. Reste à savoir si elle sera elle-même assez patiente.

Même s'ils ne représentaient pour le moment aucun danger sérieux, leurs adversaires n'avaient pas encore abattu toutes leurs cartes, se dit Syara. Elle avait pu le voir lorsqu'elle s'était confrontée à sa mère, les anges faisaient des adversaires redoutables. Restait à savoir si ceux qu'ils avaient affrontés ce jour-là faisaient partie de la norme ou de l'élite. Ça, la violoniste avait le sentiment qu'elle le saurait très bientôt.  

Le violon de cristal : l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant