Chapitre 26 :Même quand on ne cherche pas les problèmes...

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 Trois jours s'étaient écoulés depuis que Cristal avait commencé sa nouvelle vie en tant que résistante. Ses journées étaient divisées en deux. La première partie était dédiée à l'apprentissage de la vie en autonomie et le seconde à l'entraînement à la magie.

Que ce soit dans un domaine comme dans l'autre, la jeune elfe partait de loin. Comme l'avait si bien fait remarquer Mélyne lors de son passage au conseil, elle ne s'était jamais coiffée elle-même ni habillée toute seule. Ce point en particulier n'était pas des plus compliqué vu que la tenue qu'elle portait à présent était plus proche d'un torchon que d'une robe sophistiquée qu'elle avait l'habitude de porter au palais.

Pour ce qui était de la magie, Cristal avait déjà un bon niveau de maîtrise de son instrument pour jouer de la musique, mais elle comprit rapidement qu'une belle mélodie ne faisait pas tout. Sa sœur lui avait affirmé que les instruments de l'âme étaient simples à prendre en main et qu'il était tout aussi aisé d'en appeler à leurs pouvoirs pour faire ce que l'on souhaitait.

Il y avait cependant une grande différence entre Cristal et Sinélia. L'une devait tout apprendre d'elle-même tandis que l'autre avait eu son père, véritable maître en matière de magie, qui avait été présent pour la former.

À cela s'ajoutait la difficulté liée au nombre d'écoles de magie qu'elle était capable de lancer. Pour le moment, la sortie d'un élément pouvait être considérée comme aléatoire et, là où celle qui s'était révélée comme une sadique tortionnaire en possédait une dizaine, là où le roi cumulait à une cinquantaine, Cristal en dénombrait déjà plus d'une centaine et continuait régulièrement d'en découvrir.

Elle avait à peine effleuré la surface de ses pouvoirs que la vieille carrière ressemblait à un véritable champ de bataille, les corps en moins. De la glace, de la terre, des coupures dans la roche, des trou comme si ce qui se trouvait là avant avait tout bonnement été désintégré. À un endroit, un arbre gigantesque avait poussé en quelques secondes, juste à côté d'un amas de rubis brut de deux mètres qui n'était certainement pas là lorsqu'elle avait commencé son entraînement.

Son potentiel paraissait illimité et elle commençait à comprendre ce qui avait pu effrayer son père. S'il l'avait entraînée, elle aurait pu être autant son arme la plus puissante que son bourreau. En tentant de l'assassiner, il ne restait plus que le bourreau comme seule option. Cependant, si elle avait la puissance pour elle, lui avait l'expérience. Il ne fallait pas qu'elle se précipite si elle voulait avoir la moindre chance de vaincre le roi qui, contrairement à elle, maîtrisait son instrument depuis plusieurs centaines d'années et s'en était servi dans de nombreuses batailles.

La jeune elfe notait tout de même des progrès. Au premier jour, comme lors de sa démonstration dans la salle du conseil, le simple fait d'effleurer une corde suffisait à envoyer un sort aléatoire. À présent elle arrivait à jouer quelques notes avant que ça ne se produise. Le sort était alors plus complexe et son élément se rapprochait un peu de celui qu'elle avait en tête. Du moins, trois fois sur cinq.

Voulant créer un bassin près de l'arbre qu'elle avait fait pousser, Cristal s'imagina un trou dans le sol près de lui. En trois petites notes, elle entendit un petit crépitement, puis, d'un coup, tout l'arbre s'embrasa. D'un côté, elle était dépitée d'avoir échoué et d'avoir transformé sa création en une torche géante, mais elle se consola en se disant qu'elle n'avait encore jamais sorti de flammes pures de son violon. Elle pouvait donc ajouter cet élément à la liste déjà longue de ses pouvoirs.

— Je vous l'avais bien dit que les elfes, et surtout les membres de la famille royale, ne savent que détruire, entendit-elle soudainement. Même la vue d'une chose aussi belle que cet arbre les insupporte. Elle s'est sentie obligée de le réduire en cendres.

Plutôt surprise d'entendre une voix, qui plus est familière et autre que celle de Mélyne, Cristal se retourna. Isphiale marchait vers elle et n'était pas seule. Une trentaine d'autres personnes l'accompagnaient.

— Ça n'était pas mon intention, mais c'est très difficile à contrôler, se justifia-t-elle. Que faites-vous là ?

— Quoi ? Nous n'avons pas le droit de nous trouver ici ? Ça y est, la surface ne suffit plus aux elfes, maintenant il vont aussi nous prendre les grottes où on se terre ?

— Arrêtez de déformer ce que je dis. C'est surtout dangereux ici. Comme je l'ai dit, mes pouvoirs sont très difficiles à contrôler. Je ne veux pas blesser quelqu'un.

— Oui, bien sûr. Tu t'entraînes. Tu n'envoies certainement pas un message à ton père grâce à tes pouvoirs pour qu'il nous retrouve et nous extermine tous !

— Il m'a poignardée le cœur et tué ma mère ! Qu'est-ce qu'il vous faut de plus pour vous convaincre que je n'ai aucune envie de le revoir avant d'être certaine de pouvoir le tuer moi-même ?

— Tu veux peut-être effectivement le tuer, mais nous savons tous les deux ce qui se passera si ça arrive. Tu prendras sa place et pour nous, ça ne sera qu'un tyran remplacé par un autre tyran. Rien ne changera.

— C'est faux !

À peine avait-elle hurlé cela que Cristal se prit un violent revers de la main qui la fit tomber à terre et lâcher son instrument. Les compagnons d'Isphiale se précipitèrent alors sur elle et s'empressèrent de lui ligoter les poignets et les chevilles. Vu comment ils avaient réagi, ça n'était certainement pas la dispute qui avait mené à ça. Ils étaient venus pour s'en prendre à elle.

— Emmenez là !

À cause des liens qui lui entravaient les jambes, il lui était impossible de tenir debout. Ses agresseurs le savaient très bien et ne comptaient pas faire en sorte qu'elle les accompagne. Ils voulaient la traîner jusqu'à leur destination.

Tirée par une corde attachée aux liens à ses poignets, chaque mètre était une véritable torture ! Ils empruntèrent ainsi le chemin jonché de pierres coupantes et arrivèrent devant la maison. Là, d'autres hommes de la démone entouraient la cabane de bois et faisaient en sorte de maintenir son occupante à l'intérieur.

— Mélyne ! Hurla la jeune elfe.

— Cristal ! Entendit-elle depuis l'intérieur. Laissez-moi sortir ! Qu'est-ce que vous comptez lui faire ?

— Lui faire payer pour ce qu'elle a fait, cracha la résistante extrémiste lorsqu'elle passa au plus près de la porte.

Le violon de cristal : l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant