Chapitre 1

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Daphné se souvenait parfaitement bien de ce camélia qui, un hiver, avait fleurit très tôt. C'était inattendu et pourtant, le petit arbuste arborait ses fleurs roses. Marianne Harlet avait été grandement surprise de le voir ainsi un matin mais ces petites fleurs avaient fini par égayer sa journée. Daphné, assise près du camélia, avait alors regardé sa mère s'éloigner en direction du village pour ouvrir la boutique, toute guillerette. Elle avait dû en parler toute la journée à ses clients, un large sourire aux lèvres et des étoiles plein les yeux. Sa mère adorait les camélias.

Cette simple phrase prononcée par cet homme avait été toute aussi inattendue pour Daphné que l'avait été la floraison du camélia pour sa mère. Qui était-il ? Et que lui voulait-il ? La jeune femme était morte de peur, recroquevillée dans un coin de sa cellule, ses longs cheveux remplis de nœuds devant son visage. Et s'il s'agissait d'un exécuteur de mages ? Ces gens capturaient les mages et les torturaient dans le but d'extraire la magie de leur corps. Daphné l'avait lu dans un livre une fois et il y était précisé qu'aucun mage n'était ressorti vivant de ces expériences. Était-ce qui l'attendait ? Une mort lente et douloureuse ?

Elle ne voulait pas quitter cette cellule. Elle voulait être exécutée lors du dernier jour des festivités du printemps. Un seul coup de couteau au niveau de la gorge et ce serait terminé. Elle ne voulait pas vivre les pires horreurs. Elle voulait simplement retrouver ses parents au plus vite, les rejoindre dans un immense champ de fleurs et rester ainsi, tous les trois, pour l'éternité.

Mais la porte s'ouvrit, lentement, accompagnée d'un grincement désagréable. Daphné ramena un peu plus ses genoux contre elle et tentait de calmer les tremblements de son corps. Des pas s'approchèrent, quelqu'un était rentré. Elle n'osa pas relever la tête, apeurée de voir le visage de son bourreau.

« Est-ce que c'est toi, la mage ? »

La jeune femme ne répondit rien. Elle ferma un peu plus fort les yeux et retenait ses larmes.

« Je suppose que oui, reprit l'homme, je n'ai vu aucune autre cellule d'occupée. »

Il fit de nouveau un pas vers elle. Le souffle coupé par la peur, elle rentra davantage sa tête entre ses épaules.

« Tu n'as pas à avoir peur de moi, je ne te ferai aucun mal, je te le promets. Je suis venu ici pour te libérer de cette prison. »

Elle leva les yeux vers lui, une lueur d'espoir dans le regard. Était-il sincère ? Ou est-ce qu'il commençait déjà à la torturer en l'amadouant avec sa propre liberté ?

« Vrai... vraiment ? »

La voix de la jeune femme était enrouée, elle n'avait pas parlé depuis des semaines. Mais l'homme ne releva pas. Au lieu de ça, un fin sourire se dessina sur ses lèvres.

« Je n'ai aucune raison de te mentir.

–Mais... pourquoi ? »

Elle avait complètement relevé la tête vers lui. Il s'était avancé de sorte à se trouver dans le seul point de lumière de la pièce. Elle put alors l'observer. De son point de vue, il lui paraissait immense, anormalement imposant. Sans doute était-ce parce qu'elle se trouvait par terre. Ses cheveux noirs retombaient sur son visage et ses yeux gris la scrutaient, indéchiffrables.

« Quel crime as-tu commis ? Lui demanda-t-il. Comment ont-ils découvert que tu pratiquais la magie ? »

Daphné baissa le regard et observa le sol miteux de sa cellule.

« Je... j'ai fait revivre une fleur fanée.

–Quel monstre tu fais ! S'exclama-t-il d'un ton sarcastique. Ça ne vaut pas une exécution.

Comme un pétale de roseWhere stories live. Discover now