Chapitre 93

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AGNAR


Agnar balança la première chose qui lui tomba sous la main. Une chaise. Elle vola au travers de la tente et s'écrasa plus loin. Il recommença avec un brasero éteint, puis une malle. Il ravagea l'intérieur, le cœur en miettes. Et sur la table centrale gisaient les pétales fanés des fleurs de Daphné.

Ils étaient tous tombés d'un seul coup. Lorsqu'elle est tombée dans la crevasse, il était longuement resté proche du vide dans l'espoir de la voir réapparaître. Mais rien si ce n'était le choc de l'impact, des centaines de mètres plus bas. Son grand-père avait insisté pour qu'ils s'en aillent et montent le campement plus loin. À la seconde où sa tente fut montée, Agnar avait exigé à ce qu'on lui amène toutes les fleurs qu'avait pu créer Daphné.

Et il était resté là, assis devant cette table à fixer les fleurs. Jusqu'à ce qu'elles fanent. Beaucoup trop rapidement. Il savait ce que cela signifiait mais il refusait d'y croire.

Elle avait été là quelques heures plus tôt, juste devant lui, presque à sa portée. Il se souvenait du regard de pure terreur qu'elle lui avait lancé alors que ce monstre l'embarquait dans sa chute. Et il avait été impuissant. Elle lui avait échappé juste comme ça.

Il lança un cri de pure rage en renversant la table. Quelques pétales s'envolèrent et s'échouèrent plus loin. Karsten débarqua soudainement, paniqué. Il observa l'endroit ravagé, ses yeux tombèrent sur les pétales avant de s'accrocher à Agnar.

« Il l'a tuée. »

Sa voix se brisa et il tomba à genoux, éclatant en sanglots. Karsten courra vers lui et le prit dans ses bras. Pour la première fois depuis qu'ils se connaissaient, il pleura dans les bras de son ami.

Il n'avait pas pleuré à la mort de sa mère, sauf lorsqu'il se retrouvait seul dans sa chambre. Il n'avait pas non plus pleuré quand son père l'avait destitué de son titre et qu'ils avaient dû fuir. Il n'avait pas pleuré à la mort de Diane. Et à celle de Lio, c'était Daphné qui l'avait consolé.

« Pourquoi... Pourquoi elle ? »

Karsten le serra encore plus fort dans ses bras. Il pleurait lui aussi, mais tentait de le cacher.

« Je l'aime... Je l'aime tellement. Et elle est partie.

–Je suis désolé Agnar. Si tu savais... »

Agnar s'accrocha à lui et s'effondra un peu plus.

« Qu'est-ce que... »

Dunlá souleva l'entrée de la tente et son regard s'agrandit en voyant l'état de la tente. Elle fit un pas en avant et son pied écrasa un pétale. Elle s'immobilisa et regarda longuement ces fleurs fanées. Cale entra à son tour et eut exactement la même réaction. Puis vint Annabelle qui étouffa un cri en posant les yeux sur les pétales.

« Non... »

Agnar s'éloigna de Karsten et prit sa tête entre ses mains, le visage rempli de larmes.

« Elle ne peut pas être partie, murmura-t-il dans sa barbe. Ça n'est pas possible, je l'aime trop pour qu'elle s'en aille. Elle ne peut... »

Karsten posa sa main sur son épaule et la serra.

« Je suis certain que Bianca va faire quelque chose, comme la dernière fois. »

Agnar secoua la tête.

« Il faut quatre minutes pour qu'une âme quitte un corps. Après ça, on ne peut plus rien faire. Bianca l'a dit à Daphné. Si le temps est écoulé, elle ne peut plus agir. J'ai attendu ces quatre minutes. Je les ai comptées. Mais il ne s'est rien passé. Elle est... »

Comme un pétale de roseWhere stories live. Discover now