Chapitre 22

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Ian, Edmée, Tamsir, Jill, Baran. Ces cinq noms tournaient en boucle dans sa tête. Quelqu'un cherchait à lui faire passer un message, elle en était certaine. Elle souhaitait retrouver la trace de ces personnes, elle le devait. Elle était sûre que tous ces rêves qu'elle avait pu faire jusque-là avaient une signification et ne pas la comprendre la rendrait presque folle.

Mais surtout, ces rêves la hantaient, l'obsédaient.

Dès qu'ils passaient près d'un lac, elle cherchait un saule pleureur. Dès qu'elle apercevait une petite maison au loin, elle ne pouvait s'empêcher de l'imaginer en train de brûler. Passer à côté de terre meuble ? Une tombe. Une boisson ? Du poison.

Le simple fait de dormir l'effrayait. Elle craignait constamment de se retrouver une nouvelle fois dans la peau d'une inconnue. Mais surtout, elle avait peur que ces rêves finissent par complètement la détruire. Les émotions qu'elle ressentait étaient à chaque fois plus puissantes, si bien qu'elle ignorait si elles venaient d'elle ou qu'elle n'avait fait que les rêver.

Mais ne plus dormir n'était pas une solution, surtout pour sa santé, elle le savait. Alors elle avait fini par demander sa poudre somnifère à Ser Karsten. Elle avait alors passé une nuit sans qu'aucun songe ne vienne la troubler.

Les autres avaient remarqué que quelque chose n'allait pas mais aucun d'eux n'avait relevé, et elle les en remerciait. Peut-être que le Seigneur le leur avait demandé ou ils le faisaient de leur propre initiative, peu importait. Elle ne voulait pas en parler pour le moment, parce qu'elle ne savait même pas mettre des mots sur ce qu'elle ressentait.

Et elle s'était promis d'en discuter avec les mages de la Tour.

Elle secoua, presque imperceptiblement, la tête pour se sortir de ses pensées et observa le paysage alentours. Ils avaient quitté la forêt tôt dans la matinée et chevauchaient à présent sur des plaines ou près des champs. Ils longeaient une chaine de montagne qui s'étendait à leur gauche et qui disparaissait dès que le brouillard se levait. Daphné n'aurait su dire quel nom elle portait, elle n'avait jamais été très bonne en géographie.

Elle se demanda si la ville d'Harden se trouvait parmi ces montagnes, mais elle n'osa pas demander. Elle avait été particulièrement silencieuse depuis son dernier rêve, qui remontait à trois nuits déjà, elle se dit alors qu'il serait déplacé de se remettre à parler pour quelque chose d'aussi futile. Surtout qu'elle savait qu'elle se ferait charrier par Cale et Marcus, et elle n'avait pas la tête à leur répondre.

Elle remarqua au loin deux hommes travaillant dans un champ, préparant certainement les récoltes qui devraient bientôt arriver. Elle releva sa capuche pour camoufler son visage et surtout, la couleur de ses cheveux. Peu de gens les avaient aussi clairs, il serait simple de la repérer. Puis elle baissa les yeux vers sa jument. Elle ne pouvait pas non plus risquer de croiser le regard de l'un de ces hommes.

Elle portait toujours la tunique dessinée par Annabelle. Le pan à l'arrière se déployait sur la croupe de Carline et lui donnerait presque une allure de grande dame. Presque. Mais, même si elle avait été réticente à porter une telle tenue, elle devait avouer que le pantalon était bien plus pratique pour monter à cheval, elle n'avait plus besoin de chevaucher en amazone. Et madame Baralot avait utilisé des matières qui lui tenaient chaud. Alors elle n'avait pas pu se résoudre à remettre sa robe.

Si Tori avait été avec eux, elle aurait eu un sourire satisfait sur les lèvres. Et Annabelle lui aurait assuré qu'elle lui dessinerait davantage de tenues comme celle-ci.

Daphné soupira longuement. Les filles lui manquaient. Elle ne les connaissait que depuis quelques mois mais elle avait toujours été accompagnée de l'une d'elles depuis sa sortie de prison. Et il manquait cruellement de présence féminine à ce voyage.

Comme un pétale de roseWhere stories live. Discover now