Chapitre 92

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BIANCA


Impossible...

Elle ne voulait pas y croire. De tous les évènements qui auraient pu échapper à son contrôle, il avait fallu que ce soit celui-ci que le destin choisisse.

Le corps de Daphné était apparu juste après qu'elle n'ait plus accès à sa vision. Tout était devenu noir, l'espace d'un court instant. Puis le son d'une petite cloche avait résonné dans l'arène, son qu'elle aurait reconnu entre mille. Et Daphné était là, étendue dans le sable et la cendre.

Bianca resta silencieuse un long moment, à l'admirer. Avec sa longue chevelure blond polaire étendue autour de sa tête, sa robe blanche et ses traits fins, elle avait tout d'un ange endormi. Endormi pour l'éternité.

Elle tomba à genoux à côté du cadavre. Elle refusait d'y croire.

« Daphné ? » Elle la secoua doucement. « Daphné, réveille-toi. »

Aucune réaction. Le cœur de Bianca se brisa et une profonde colère monta.

« Daphné, réveille-toi. Dépêche-toi ! Daphné !!! »

Elle continuait à secouer son corps. Et pour la première fois depuis des siècles, elle pleurait. Des larmes chaudes et salées roulaient sur ses joues et s'écrasaient sur la robe et le visage de Daphné. Puis elle hurla. Trois mille ans de peine, de douleurs et de rage ressortirent.

Elle avait perdu. Une fois de plus.

Elle était pourtant persuadée qu'elle réussirait à obtenir tout ce qu'elle souhaitait dans cette réincarnation. Le pouvoir, et une vie heureuse aux côtés de Ian. L'avenir qu'elle avait vu pour Daphné était pourtant radieux. Il avait suffi que Darren et son égo s'en mêlent pour que tout s'effondre. Son rêve, ses espérances, son bonheur. Tout était parti en cendres.

Mais elle ne voulait toujours pas y croire. Elle voulait de cet avenir qu'elle avait entraperçu, c'était ce qu'elle désirait le plus au monde. Le destin n'avait aucun droit de le lui retirer, pas après... tout ce qui s'était passé.

Elle continua à secouer le corps de Daphné, protégeant cette petite et faible lueur d'espoir qui brûlait encore en elle. Elle pouvait se réveiller. Elle devait se réveiller. Mais il ne se passait toujours rien. Daphné restait immobile et silencieuse.

Bianca frappa le sol, qui se fissura dans un craquement sinistre, les yeux remplis de larmes. Elle en voulait à l'univers tout entier. Pourquoi est-ce qu'elle n'avait pas le droit à quelques instants de bonheur ? Pourquoi est-ce qu'on persistait à lui refuser une si petite chose ? Pourquoi avait-elle été condamnée à vivre cet enfer pour l'éternité ?

« Ronhjar ! Hurla-t-elle, en pleurs. Je vous en supplie, aidez-moi ! Elle ne peut pas mourir, pas maintenant. S'il vous plait ! »

Pour la première fois de sa vie, elle suppliait quelqu'un. Elle continuait à l'appeler, désespérée, hurlait comme elle ne l'avait jamais fait auparavant, quitte à en perdre la voix.

Autour d'elle, sa dimension s'écroulait peu à peu. L'arène continuait de se fissurer, les cristaux se brisaient les uns après les autres, les bâtiments en suspend s'écroulèrent, tombant soit dans le vide infini ou se brisant sur le sol de l'arène, et son trône tombait en morceaux. Des crevasses se créèrent, le sable et la cendre s'en écoulèrent. Tout n'était que chaos, répondant à ses émotions.

Seules les portes menant aux souvenirs de ses vies restaient intactes. Bianca hurla et frappa de nouveau le sol en remarquant une nouvelle porte, dont l'encadrement était décoré de feuillage et de fleurs et était surmonté d'une couronne enroulée dans du lierre. La porte de Daphné, renfermant les souvenirs d'une vie achevée.

Comme un pétale de roseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant