Chapitre 95

238 25 50
                                    

« Agnar ! C'est quoi ce bordel ?! »

Daphné resta pantoise devant l'état de leur tente. Des meubles avaient été retournés, ses malles avaient été vidées et des bouteilles d'alcool vides gisaient sur la seule table encore debout. L'entrée de la tente se souleva dans son dos et Agnar s'éclaircit la gorge en la rejoignant.

« Eh bien... J'ai eu... un coup de mou ? »

Elle se tourna vers lui, sidérée. Il se contenta de lui adresser un sourire gêné qui ne monta pas jusqu'à ses yeux, cernés par la fatigue.

« D'accord, lança-t-elle en prenant une grande inspiration. Je vais fermer les yeux et faire comme si je n'avais rien vu. »

Elle enjamba les vêtements et se dirigea jusqu'à la baignoire, elle aussi épargnée par la tornade qui avait visiblement retourné cette tente.

« Est-ce que tu m'en veux pour... tout ça ? »

Elle s'arrêta dans son geste.

« Pourquoi est-ce que je t'en voudrais ? Fit-elle, surprise. Je sais ce que tu as ressenti... je le sens. Je ne pourrais jamais t'en vouloir, c'est impossible. Je ne m'attendais juste pas à ce que tu... te sois autant exprimé. »

Agnar se détendit soudainement et s'approcha, en ramassant les vêtements sur son passage pour les poser une la chaise la plus proche.

« Si j'ai bien un point commun avec mon père, c'est celui-là. »

Daphné posa ses mains sur ses hanches.

« Tu es sûr que c'est le seul point commun ? Parce que, même si tu ne veux pas l'admettre, il y a une ressemblance physique évidente. Et ça se confirme encore plus en te voyant à côté d'Aemma. Sincèrement, les gens n'ont jamais fait le rapprochement ? »

Il rit doucement en tentant de plier une jupe, tandis que Daphné faisait apparaître de l'eau chaude dans la baignoire. Elle se surprit elle-même à le faire instinctivement. Pourquoi ne l'avait-elle jamais fait avant ?

« Il y avait des rumeurs, sans plus. Ma mère disait toujours qu'Aemma était une lointaine cousine dont elle avait la charge pour parfaire son éducation noble. »

Daphné grimaça. Elle avait quand même du mal à croire que les gens de la cour avaient pu avaler ce mensonge. Aemma était le portrait craché de l'empereur, elle lui ressemblait peut-être même plus qu'Agnar, qui possédait quelques faux-airs de sa mère.

« Tu fronces ton nez, ria Agnar en continuant de plier les vêtements. Qu'est-ce qui te contrarie ?

–Rien, je trouve ça juste lunaire que les gens n'aient pas posé davantage de questions. »

Il haussa les épaules.

« Les gens faisaient confiance à ma mère. »

Elle acquiesça. Elle ne pourrait jamais savoir ce que les gens pensaient réellement à cette époque.

Elle entreprit donc d'enlever ces bottes, ce qui la soulagea tant qu'elle laissa échapper un soupir. Son corsage et sa tunique déchirés suivirent rapidement, tandis qu'elle continuait de se poser des questions, occupant son esprit pour éviter de penser à ce manque qu'elle ressentait sans cesse.

« Ton père a d'autres bâtards ? S'enquit-elle en balançant son pantalon troué et sale plus loin.

–Bien sûr. Le tout reste de les compter. Je crois qu'il n'a lui-même pas conscience du nombre. Aemma est la seule qui est plus âgée que moi, sa mère n'était pas la première conquête de mon père, qui adorait séduire en passant, mais elle a été la seule à tomber enceinte. Ou du moins la seule à se manifester. »

Comme un pétale de roseWhere stories live. Discover now