Chapitre 86

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« Quoi ? »

Le voix d'Agnar se brisa légèrement. Mais Daphné l'entendit à peine.

Fosca a disparu. Les paroles de Dunlá tournaient en boucle dans son esprit, et un millier de questions les accompagnaient. Quand ? Comment ? Pourquoi ? Qui ? Elle arrivait à peine à réfléchir correctement.

Dans l'espoir que ce fusse une mauvaise blague, la jeune femme étendit sa magie et chercha la présence de la religieuse dans le château. Ses pouvoirs se déployèrent à une vitesse phénoménale, s'insinuaient dans le moindre recoin, entre toutes les pierres, comme si elle avait pu s'y faufiler. Mais rien. Fosca était véritablement absente.

« Comment ça elle a disparu ? Reprit Agnar en tentant de contenir à la fois une colère sourde et une inquiétude grandissante.

–Elle est partie prier peu de temps après que vous vous soyez éclipsés, commença Dunlá, c'est la dernière fois que nous l'avons vue. Nour la rejoignait pour prier tous les matins mais elle ne l'a pas trouvée aujourd'hui. Elle est nulle part, c'est incompréhensible. »

Le cœur de Daphné se serra davantage. Elle ne comprenait pas comment c'était possible. Fosca ne serait jamais partie d'elle-même. À moins que... quelqu'un s'était infiltré et l'avait enlevée, profitant de l'absence de Daphné pour avoir le champ libre.

« Où sont les autres ? S'exclama Agnar en montant les marches trois par trois.

–Karsten et Harden ont pris des hommes pour quadriller les alentours, expliqua la guérisseuse. Tori est aussi à la recherche d'indices. Maxine est avec Annabelle, elles se sont enfermées pour qu'elle puisse déclencher une vision et tenter de retrouver Fosca. »

Ils continuaient à parler ensemble mais Daphné n'écoutait plus. Des mains invisibles la saisirent à la gorge, lacéraient sa peau, tiraient surs bras pour la mener ailleurs. Elle se figea en sentant des miasmes d'une magie qui n'était pas la sienne. Une magie ancienne et puissante. Une magie qu'elle avait déjà affrontée.

« La chapelle... »

Sa voix n'avait été qu'un souffle et pourtant, Agnar et Dunlá se tournèrent vers elle, stoppés dans leur discussion. Daphné leva vers eux des yeux animés par une peur mordante, qui tordait ses trippes et asséchait sa bouche.

Cette sensation de mal-être s'intensifia alors qu'elle déployait plus de magie autour de la minuscule chapelle du château. Elle ne voulait pas y croire. Et pourtant...

Elle se précipita dans la direction du petit bâtiment, traversant les couloirs le plus vite possible. Elle regardait tout autour d'elle, à la recherche d'un indice laissé. Quelques bribes de cette autre magie traînaient par-ci par-là, posées sur le cadre d'un tableau, flottant devant une fenêtre comme si elles observaient l'extérieur, accrochées aux appliques murales ou se balançant depuis les lustres.

Elle ouvrit les portes de la chapelle à la volée, les faisant claquer contre les murs. Le choc résonna dans le couloir.

Horrifiée par ce qu'elle trouva, Daphné cessa de respirer. Un immense rubis avait été posé sur l'autel, au pied duquel était déposé le cadavre du prêtre, sa robe blanche imbibée de sang. Sa tête était penchée vers l'avant, mais ses yeux étaient grands ouverts, figés dans une expression d'effroi. Et sur ses genoux, des dizaines de petits rubis attendaient d'être pris.

Mais le regard de la mage resta accroché à quelque chose d'autre, derrière l'autel. Sur l'imposante croix en bois avait été dessiné un D avec du sang encore frais.

Des pas précipités résonnèrent depuis le couloir et quelqu'un étouffa un cri.

« C'est impossible, murmura Dunlá. Ça n'était pas là tout à l'heure, Nour est venue, moi aussi, nous... »

Comme un pétale de roseWhere stories live. Discover now