Chapitre 67

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AGNAR

Agnar eut l'impression qu'on lui martelait le crâne alors que, la vue brouillée, il tentait de reprendre ses esprits. Il avait beau se sentir nauséeux, son corps ne ressentait plus aucune sensation, comme endormi.

La première chose qu'il vit fut le sable noir sous lui. Non, de la cendre. De la cendre qui s'accrochait à ses vêtements et tâchait sa peau, qui s'envolait et tournait autour de lui alors même qu'aucune brise ne soufflait.

En levant la tête, il vit d'abord les autres en train de prendre leurs repères, comme lui. Lio toussait bruyamment, crachant des cendres, et Fosca l'aidait en lui tapant doucement le dos. Annabelle époussetait frénétiquement ses vêtements et secouait ses cheveux pour en enlever la saleté.

Puis Agnar contempla longuement le paysage. Un paysage de désolation. Des morceaux de bâtiments en ruine flottaient dans les airs, bougeant presque imperceptiblement au-dessus du vide. Eux se trouvaient dans une place circulaire, semblable à un amphithéâtre, entourée d'améthystes géants s'illuminant régulièrement.

Mais ce qui l'impressionna le plus fut l'immense trône qui envahissait l'espace, ressemblant étrangement au squelette du serpent auquel il avait fait face. Une fumée violette s'en échappait, menaçante.

Et surtout, un silence écrasant absorbait tous les sons qu'ils pouvaient produire, comme pour ne pas perturber le calme éternel dans lequel se trouvait leur hôte.

« Agnar ! »

Dunlá lui fonça dessus, l'air paniquée.

« Quelque chose ne va pas avec Daphné. Juste avant qu'elle ne m'envoie ici j'ai vu que son bras était en sang. Que s'est-il passé ? »

Agnar grimaça. Il n'appréciait pas l'idée que Daphné soit blessée, surtout alors qu'il était certain qu'elle lui cachait quelque chose. La blessure était arrivée soudainement alors qu'elle dormait. Était-ce Bianca qui l'avait blessée ?

Il ouvrit la bouche pour lui répondre mais une voix s'éleva depuis le trône, aussi puissante que le tonnerre.

« Daphné va bien. »

Tous se tournèrent. Perchée sur le trône, une femme était nonchalamment assise sur un siège recouvert de fourrure animale, le menton posé dans sa main. Bianca.

« Nous avons toutes les deux eu une... altercation avec notre créateur. Son bras guérira avec le temps. »

La silhouette de Bianca se leva et sortit de l'ombre pour descendre lentement les marches. Agnar put enfin découvrir sa véritable apparence.

Et il fut surprit de constater que son visage était traversé de quatre larges griffures, semblables à celle que portait Daphné. Les blessures semblaient être encore en train de cicatriser. Mais elle ne paraissait pas être dérangée par ces entailles puisqu'elle fit briller ses yeux, comme Daphné avait pris l'habitude de le faire lorsqu'elle était contrariée ou en colère. Sa longue chevelure brune renforçait son teint pâle et flottait paisiblement autour de son visage. Elle portait une robe violette bien trop légère pour être décente, dévoilant l'une de ses jambes musclées et ses pieds nus.

À chaque pas qu'elle faisait, la cendre jonchant le sol s'écartait pour ne pas la salir et la fumée descendant du trône la suivait comme une ombre.

Bianca était très différente de ce à quoi Agar s'était attendu. Son visage était bien plus anguleux et son corps plus musclé, alors que les traits de Daphné étaient bien plus doux. Mais elle dégageait malgré tout une certaine grâce surnaturelle, quelque chose qui attirait irrémédiablement l'œil.

Comme un pétale de roseWhere stories live. Discover now