Chapitre 17

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Le cortège avait reprit la route depuis quelques jours déjà, dès que les soldats les plus gravement blessés en furent capables. Les deux voitures, réparées, ainsi que les charriots servaient à transporter ceux qui n'avaient pas encore la force de monter à cheval.

Daphné avait décidé de chevaucher à l'écart des autres filles afin de trouver un peu de calme et enfin se reposer. Les derniers jours avaient été éprouvants, pour tout le monde, mais pour la mage particulièrement. Elle avait passé des jours entiers, et des nuits entières, à soigner chaque soldat un à un, ne s'arrêtant que lorsqu'elle se trouvait à court de magie.

Aidée de Dunlá, elle s'était d'abord occupée de ceux dont l'état était critique, presque sans espoir. La guérisseuse le lui avait dit, s'il n'y avait pas eu la magie, ceux-là auraient péri. Elle ne pouvait plus rien faire pour eux si ce n'était prier pour que la mort achève toutes leurs souffrances le plus rapidement possible.

Il y avait eu ce chevalier en particulier, dont une partie du ventre avait été profondément coupé, ainsi que le côté gauche de son visage. La mage avait passé presque trois heures au-dessus de lui à refermer ses blessures. Il avait fallu quatre soldats pour le maintenir alors qu'il hurlait à plein poumon, se débattant dans l'espoir de faire cesser la douleur. Daphné n'avait pas pu s'empêcher de pleurer alors qu'elle tentait de le rassurer en lui parlant.

« Tout ira bien, vous verrez, votre peine cessera bientôt. Vous sortirez de cette tente, vous reverrez le soleil et vous pourrez de nouveau rire, boire et chanter avec vos camarades. Tenez bon. »

Mais ça n'avait pas suffi. Alors elle s'était risquée à absorber ses émotions d'une main, alors qu'elle soignait ses blessures de l'autre. Il avait fini par se calmer mais la jeune femme avait passé les deux heures qui avaient suivi à ressentir sa douleur pour l'en soulager. Elle avait eu envie de se griffer le visage, de s'arracher la peau du ventre et de hurler à plein poumons. Mais elle avait serré la mâchoire et fermé les yeux en priant pour que sa magie ne lui fasse pas faux bon avant qu'elle n'ait terminé.

Elle savait que ce soldat se trouvait derrière elle, dans l'une des voitures à se reposer. Il avait écopé de deux vilaines cicatrises, affreusement larges, au ventre et au visage. Mais il était vivant et pourrait bientôt à nouveau combattre. C'était tout ce qui importait.

La main dans la poche de sa jupe, elle serra dans sa paume une petite sculpture en bois. Un soldat le lui avait offert.

« C'est pour vous. Je suis conscient que c'est un bien maigre présent pour ce que vous avez fait mais c'est la seule chose que je puisse vous offrir. Pour vous remercier pour avoir soigné ma main. » Elle avait été brisée. « Et... pour tout le reste. »

Elle sortit le petit objet et le contempla longuement. Il s'agissait d'un petit hibou la fixant avec de grands yeux. Elle l'adorait et comptait bien le garder toujours avec elle. Elle le rangea précautionneusement sans sa poche et reporta son attention devant elle.

Elle eut une pensée pour Petra, qu'elle n'avait pas revu depuis cette discussion qu'elle avait eue avec le Seigneur, comme l'avait prédit Fosca. Elle se demandait si elle avait déjà atteint la capitale ou si elle y serait avant l'impératrice. Mais surtout, elle pensa au mercenaire. L'espionne l'avait-elle déjà tué ?

Daphné eut de la peine pour cet homme, malgré ce qu'il avait fait. Des mercenaires, elle en avait vu pas mal dans son village. Ils ne s'arrêtaient généralement que pour une nuit mais elle se souvenait parfaitement bien de l'un d'eux qui avait avoué ne pas faire ce métier par choix. Il avait simplement besoin d'argent et c'était le meilleur moyen qu'il avait trouvé pour gagner sa vie rapidement. D'autres encore le faisaient pour rembourser des dettes.

Comme un pétale de roseWhere stories live. Discover now