Chapitre 39

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Cette femme, assise nonchalamment sur le siège du duc, les observait d'un air curieux, presque suffisant. Les jambes passées par-dessus l'un des accoudoirs, elle tenait dans sa main une fleur créée par Daphné et la faisait lentement tourner entre ses doigts. Sur le côté, Maxine, Annabelle et Fosca semblaient retenir leur souffle.

« Monseigneur. »

Ce mot roula doucement sur la langue de l'étrangère, l'accompagnant d'un signe de tête et d'un fin sourire sans émotion. Par précaution, Daphné déploya pleinement sa magie et pour la première fois, ses pouvoirs se mirent à gronder. L'étrangère fronça les sourcils en portant son attention sur elle, inclinant la tête sur le côté. Ses longs cheveux noirs tressés tombèrent sur le côté.

« Laurel. »

Le Seigneur abaissa sa lance et la fit taper sur le sol pour de nouveau attirer l'attention de la nouvelle venue sur lui.

« Je ne m'attendais pas à te revoir aussi tôt, reprit-il, j'ignorais même que vous aviez embarqué. »

Laurel haussa les épaules.

« Nous avons été pressés par le temps et je n'ai pas eu l'occasion de vous envoyer un petit quelque chose. Je comptais bien le faire en débarquant dans ce port au nord d'Avisir, quel est son nom déjà ? Peu importe. Le fait est que je me suis dit qu'il valait mieux que nous prenions la route immédiatement et que le chemin n'était pas si long jusqu'ici, le message aurait été inutile. Mais j'ai été surprise en voyant les soldats impériaux tenter de pénétrer l'enceinte du château et ces trois-là essayer de le défendre. Mais je crois que j'ai été encore plus surprise en apprenant ce qui vous était arrivé. À tous les deux. »

Elle se leva enfin du trône, y laissant la fleur, et s'approcha d'eux. C'est à ce moment-là que les autres débarquèrent, s'arrêtant au pas de la porte, essoufflés.

« Tu dois être Daphné, continua-t-elle, la remplaçante de Diane. Je suis Laurel, le Scorpion, ancienne esclave née d'une mère esclave elle aussi dans un pays très loin au sud, je t'épargne le nom, tu ne connaîtrais pas. J'ai rencontré Agnar Hemmingsen grâce à mon dernier maître venu le rencontrer alors qu'il venait à peine de conquérir Avisir. Agnar m'a racheté et immédiatement affranchi. Depuis, je le sers en tant qu'espionne et experte dans le maniement du poison. »

La mage comprit alors que l'état des cadavres à l'extérieur avait été causé par cette femme et certainement ces hommes en armure étrange qui s'en occupaient. D'ailleurs, elle portait une tenue assez similaire aux leurs, bien que plus féminine. Ce qui la différenciait d'eux était la couleur de ses vêtements. Cet indigo faisait ressortir sa peau mate, bien qu'elle ne fût pas aussi foncée que celle d'Annabelle. Dans ses yeux noisette brillait un air menaçant, celui d'un serpent près à avaler sa proie. Quelques mèches ondulées ressortaient de sa tresse et son nez aquilin donnait à son visage un air aussi gracieux que menaçant.

Daphné rappela alors sa magie et jeta un coup d'œil vers le Seigneur qui semblait analyser chaque détail sur Laurel.

« Merci pour ton aide, déclara-t-il finalement. Si tu n'étais pas arrivée au bon moment, j'ignore si nous aurions trouvé cet endroit dans le même état. »

L'espionne haussa les épaules.

« Les filles ne s'en sortaient pas trop mal, les explosifs de Maxine sont plutôt efficaces et vos soldats sont bien entraînés. Et de toute façon, les hommes de l'empire ne comptaient pas s'emparer d'Avisir, ils étaient trop peu nombreux pour ça, ils n'auraient jamais tenu le château. Ce n'était rien de plus qu'un avertissement. Au moins, les Qisantiens ont pu se dégourdir les jambes après ce voyage en bateau.

Comme un pétale de roseWhere stories live. Discover now