Chapitre 78

247 30 38
                                    

Daphné les fit atterrir à l'entrée de leur propre campement, épuisée et ayant utilisé presque tout son mana. Poisseuse du sang des chevaliers impériaux, elle rêvait de prendre un bain pour s'en débarrasser. Rien n'avait été épargné. Ses cheveux, ses vêtements, son visage. Et Tori était dans le même état.

Mais au moins, elle savait qu'elles avaient été efficaces. Deux camps ennemis avaient été anéantis. Cela faisait une petite centaine de soldats en moins à devoir affronter.

Mais la mage fut d'autant plus consciente de l'état dans lequel elles rentraient lorsque les hommes d'Ackton, et le seigneur lui-même, les dévisagèrent alors qu'elles traversaient le campement. L'espace d'un instant, elle croisa le regard d'Edouard qui, arrêté dans le mouvement qu'il faisait, la fixait avec un air à la fois ahuri et horrifié. Elle passa devant lui sans s'arrêter, ne lui accordant pas la moindre importance. Elle était vidée de son énergie, discuter avec lui n'était même pas envisageable.

« Je suppose que vous rentrez victorieuses, s'exclama le seigneur Ackton. »

Tori passa auprès de lui et buta délibérément contre son bras, le faisant pester.

« Vous attendiez-vous à une défaite ? Répliqua-t-elle froidement. »

Ackton lui lança un regard glacial mais elle continuait son chemin, sans se retourner.

« Vos trois milles ans d'expérience vous ont été bénéfiques, mademoiselle Harlet ? Cracha le seigneur tandis que la mage passait à côté de lui.

–Autant qu'ils vous le seront lorsque vous vous retrouverez sur un champ de bataille. »

Elle ne lui laissa pas l'occasion de répondre et se dirigea vers sa tente, qu'elle trouva vide. Elle aurait tant aimé qu'Agnar se trouve là, assis devant la table ou allongé dans le lit à lire un rapport ou une lettre. Mais elle était seule, et ça lui pesait.

Elle avait détesté ce qu'elle avait fait. Elle n'avait pris aucun plaisir à écouter les cris de douleur des soldats, les regarder tenter de s'échapper et s'acharner sur le bouclier, les voir tomber les uns après les autres, tué par la lame de Tori, la magie de Daphné ou ses pantins revenus des morts. Et la sensation d'attraper une âme prête à s'envoler vers les cieux et l'emprisonner dans un corps sans vie pour le relever était affreuse. Elle ne comprenait pas comment Bianca avait pu apprécier ça et le faire régulièrement.

La jeune femme s'appuya sur la table et ferma un instant les yeux, autant pour se reposer un peu que pour ne pas voir le sang séché sur ses cheveux.

Si Agnar avait été là, il l'aurait prise dans ses bras, aurait plaisanté un peu puis l'aurait rassuré. Mais il ne reviendrait pas avant plusieurs jours. Dieu seul savait quand il serait de retour. Et dans quel état.

« Daphné ? »

La voix d'Annabelle la ramena au présent. Elle se redressa au moment où la voyante passait une tête dans la tente, la cherchant du regard. Lorsque ses yeux se posèrent sur la mage, elle grimaça.

« Heureusement que je suis venue te voir, dit-elle en abaissant le pan de la tente derrière elle, tu vas définitivement avoir besoin d'aide pour enlever tout ça. »

Daphné laissa échapper un rire sans joie. Sans attendre de réponse de sa part, Annabelle commença à préparer la baignoire.

« Je vais chercher de l'eau chaude, déclara-t-elle. Et mon savon préféré, celui à la fleur d'oranger. C'est la maison qui offre. »

Elle lui lança un clin d'œil avant de s'éclipser. Daphné soupira. Elle n'aurait jamais eu le courage de demander de l'aide mais elle était contente qu'Annabelle soit venue. Elle aurait détesté rester seule.

Comme un pétale de roseजहाँ कहानियाँ रहती हैं। अभी खोजें