Tome II, chapitre XIV.

19.1K 1.8K 803
                                    

Isaia se dépêcha de manger le reste de son repas et s'excusa auprès de son père, prétextant des devoirs et des cours à réviser pour pouvoir s'éclipser au plus vite. Il passa par l'entrée et prit une petite clé dans le pot à cet effet et repartit dans sa chambre. Sauf qu'il s'arrêta un peu avant et enfonça la clé dans la serrure puis entra silencieusement dans la pièce aux senteurs de peintures et de produits chimiques, aux toiles accrochées aux murs et recouvrant le sol, au chevalet et surtout, à la nostalgie et la tristesse immense. Il eut toujours autant de mal à rester à l'intérieur, mais sa curiosité le poussa à, pour la première fois, déplacer les toiles empilées les unes sur les autres, en cherchant des biens spécifiques.

Trop perdu dans sa recherche, il n'entendit pas la porte s'ouvrir et une présence dans son dos, qui observait avec intention le grabuge qu'il causait.

— Tu cherches ce que je t'ai dit ?

Isaia sentit son cœur louper un battement en même temps qu'il sursauta. Une toile glissa de ses doigts et vint s'échouer au sol. Il se précipita directement dessus pour s'assurer qu'il n'ait rien abîmé et heureusement, celle-ci était intacte. Son père s'approcha de lui et en saisit une avant de l'épousseter, faisant voler de la poussière autour d'eux.

— Pardonnes moi, je ne voulais pas te faire peur, s'excusa Leo en lui offrant un petit sourire.

— Ça va.

Le châtain n'osait plus bouger et regarda son père, qui lui-même était absorbée par un tableau représentant deux enfants à la peau ébène, sur un fond bleu nuit. Puis, il se rendit compte que c'était la première fois qu'ils se retrouvaient ici tout les deux depuis... Sa disparition. Ils y allaient chacun de leur côté et jamais en même temps, rendant leur visite solennelle. Prit en faute, il ne tut et se contenta d'attendre.

— Si tu cherches les portraits dont je t'ai parlé, ils sont tous chez ta grand-mère, dans son grenier... Mais s'ils t'intéressent, je peux aller les chercher ? se proposa son père, reposant la toile et se tournant vers lui.

— Euh non, j'irais. De toute façon, je dois y retourner un jour ou l'autre, je... J'ai juste peur qu'ils m'en veuillent, après pratiquement cinq ans de silence...

— Ils ne t'en voudront pas Isaia, c'est tes grands-parents, ils t'aimeront toujours et comprennent ton mal. Puis je reste en contact avec eux, ils me demandent tout le temps de tes nouvelles et quand nous viendrons leur rendre visite, preuve qu'ils ne t'en veulent pas. Ne te tracasses pas pour ça et vas-y quand tu te sens prêt, c'est le plus important, le rassura-t-il d'une voix douce et compréhensive.

Il hocha simplement la tête, perplexe mais d'accord avec son père, même s'il craignait une réaction négative des parents de sa mère... En cinq ans, les gens changent ainsi que la façon de penser. Il avait peur qu'ils lui reprochent de pas être venu avant, ou même de passer un coup de téléphone, ça ne prenait que quelques minutes après tout. D'ailleurs, est-ce qu'ils le reconnaîtraient ? Isaia avait changé, il n'était plus un enfant. La dernière image qu'ils avaient de lui était à l'enterrement, quand il était encore en quatrième. Maintenant il était en terminal et était devenu un homme.

— Mais... Pourquoi sont-ils chez ses parents ? Pourquoi je ne me souviens pas que maman peignait ce genre de personne ? demanda-t-il curieusement.

Isaia avait la crainte immense d'avoir oublié ce détail chez sa mère, que sa mémoire lui ait effacé avec le temps. Leo Gianni sourit avant de lui tourner le dos et de se diriger vers l'autre bout de la pièce, piochant un tableau bien précis et le brandit devant lui, le montrant à son fils.

Trompé de numéro.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant