Chapitre 108 - Le Bal de Yule

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À la suite de l'incident ayant causé la métamorphose de Terry, Emeric était revenu vers son groupe d'amis d'origine, délaissant peu à peu celui de Durmstrang, bien qu'il continuait à les fréquenter de manière régulière. Il devenait habituel de croiser les quatre jeunes gens ensemble : à table, pendant les cours, entre les cours... Partout où ils allaient, Kate, Emeric, Maggie et Terry semblaient inséparables.
Cela au détriment d'une personne qui éprouvait une nouvelle solitude, qu'elle accueillait comme une vieille amie : Morgana. Dépitée que Kate ne lui prête plus autant d'attention maintenant qu'elle avait retrouvé les bras de son Serdaigle, la jeune fille devait se contenter de quelques discussions pendant les cours de botanique ou quand elles se croisaient. Mais certains jours, cela n'allait pas au-delà des simples salutations. Cela rendait Morgana amère. N'était-elle réduite à n'être qu'une amie de rechange ?
Pour se sortir ces idées de la tête et éviter de replonger dans une spirale de haine et de colère, Morgana passait de plus en plus de temps dans la salle privée de Mathieu Belfeuille, au sein des grandes serres. Quelquefois, elle restait lire également dans sa chambre, mais la présence d'Eibhlin la dérangeait. Les deux camarades échangeaient quelques mots, mais n'avaient pas réussi à établir de lien un tant soit peu conséquent, bien qu'elles partageaient un caractère plutôt similaire. Mais deux solitaires qui ne croyaient pas en l'amitié ne pouvaient rien créer de concret entre elles. Elles se satisfaisaient, ni trop bavardes, ni trop envahissantes, mais Morgana avait besoin de son cocon pour se ressourcer.
Mathieu n'était pas toujours là quand elle entrait dans sa pièce. Quand il était présent, il ne lui prêtait que peu d'attention, se contentant de répondre sèchement à ses questions dès que Morgana lui réclamait des renseignements sur certains de ses spécimens ou lui demandait ce qu'il lisait ou étudiait. Elle avait désormais sa place attitrée, sur un grand siège rembourré aux motifs baroque vert pâle. Elle pouvait y lire des heures.
Après quelques semaines, elle avait remarqué qu'un nécessaire à thé avait été entreposé sur une étagère. Mathieu n'avait rien avancé concernant cette attention, lui qui avait toujours dénigré ouvertement cette manie typiquement britannique, mais Morgana s'en saisit petit à petit, sans même le remercier. Comme des échanges muets. Elle avait donc commencé à prendre l'habitude de lire, un plaid sur les genoux en cette période hivernale, son thé sur la petite console adjacente, inspirée du courant de l'art nouveau. Parfois, Mathieu l'observait quelques secondes, intrigué, avant de repartir dans ses recherches.
Une étrange complicité s'était créée entre eux. Il n'avait pas forcément eu besoin de parler ou de s'apprécier : ils se comprenaient et cela leur suffisait.
Un soir, Morgana se dirigea vers la salle de Mathieu, mais elle croisa en chemin Silvia Fiori, l'enseignante de l'académie de Beauxbâtons. Il s'agissait encore d'une jeune femme, approchant de la trentaine, avec de belles joues roses et de somptueux cheveux bouclés d'un blond vénitien. Ne désirant pas éveiller les suspicions, Morgana hésita à faire demi-tour, prétextant qu'elle s'était trompée, mais la professeur l'arrêta :

— Morgana, c'est ça ?

Son accent italien ressortait très légèrement dans son anglais pourtant maîtrisé. Elle connaissait son nom car assurait les cours de botanique pour les élèves de Poudlard, Wolffhart s'en étant pleinement déchargé en arguant qu'il n'avait pas combattu l'un des plus grands mages noirs de ce siècle pour devenir fleuriste !

— Oui, professeur, répondit Morgana avec une voix grave, n'incitant pas à la conversation.
— Tu viens voir Mathieu, c'est ça ?
— Pas spécialement.
— Je te vois régulièrement passer par ici.

Cette fois, Morgana se mura dans le silence, attendant de voir la forme que prendrait cet échange. Silvia afficha un petit sourire amusé :

— Est-ce parce que tu apprécies la botanique ?
— J'aime bien. Je n'exclus pas d'y travailler plus tard. Mais certainement pas comme professeur, sans vous manquer de respect.
— Ou est-ce que tu apprécies plutôt autre chose en venant ici ?

Ludo Mentis AciemWhere stories live. Discover now