Epilogue

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UN AN PLUS TARD

Des cris de nourrisson emplissaient la maisonnée.

— Tu peux aller le voir, s'il te plaît ? Je n'ai pas encore fini de me préparer.
— J'y cours, j'y vole.

Terry soupira et posa un marque-page dans son grimoire intitulé « Le secret magique à travers le monde ; postulats juridiques d'une cohabitation millénaire » avant de le refermer. Il avait aménagé l'une des pièces de la maison de Godric's Hollow en bureau afin de mener ses études à domicile pendant un temps. Il lui restait encore quelques mois avant de passer le barreau pour devenir avocat du Ministère, mais le jeune homme de maintenant vingt ans espérait prétendre, à l'avenir, à l'un des postes vacants de juge au Magenmagot. Les vieux croûtons qui montaient la moyenne d'âge du conseil au centenaire avaient fait leur temps, répétait-il à qui voulait l'entendre. Terry faisait partie de cette nouvelle génération pleine de rêves et d'ambitions qui désiraient provoquer le changement.
Il trotta d'un pas joyeux à travers l'étage et ouvrit la porte au fond du couloir.

— Eh ben alors ? C'est quoi ce gros chagrin ?

Terry se pencha au-dessus du berceau au fond de la pièce, peinte en vert citron, pour y cueillir le poupon.

— Chhhh, chhhh...

Il le blottit contre sa grande clavicule et le ballota en basculant tour à tour sur ses pieds.
Shawn était un miracle aux yeux de tous. Une énigme pour l'équipe de guérisseurs de Ste Mangouste qui avait annoncé à Maggie un an plus tôt qu'elle ne serait plus jamais en capacité d'avoir des enfants. Deux mois, il avait fallu seulement deux mois pour qu'elle retombe enceinte. Sa grossesse avait été suivie par le corps médical londonien, qui craignait, à juste titre, les fausses couches. Mais Maggie avait mené sa grossesse presque à terme, accouchant deux semaines plus tôt que la date prévue, le 31 août 2006.

« Il sera sans aucun doute le plus jeune de sa promotion à Poudlard ! avait plaisanté Emeric, qui était venu leur rendre visite depuis New York pendant l'interruption de ses études à cause des vacances. Je suis bien placé pour le savoir ! », rajoutait-il, lui qui était né un 30 août.

Sa marraine, Moira, avait également renchérit en avançant qu'il ferait probablement partie de la classe du dénommé Albus Severus Potter, né quelques mois plus tôt, et qui avait fait momentanément l'encart de quelques journaux voyeuristes.

« S'ils sont ensemble dans le dortoir à Gryffondor, ça risque de sacrément dépoter ! »

Dans les bras de son père, Shawn se tranquillisa. Terry embrassa son crâne chevelu. Il était son nouveau trésor. Pendant les huit mois d'attente, il avait douté, il avait craint, il avait cauchemardé. Par chance, quand il était né, Shawn avait montré des bras potelés vierges de toute marque. Terry avait bien pris le temps de vérifier chaque centimètre...
Une fois que son fils eut cessé de pleurer, Terry se rendit dans la chambre parentale et frappa à la porte.

— Je crois qu'il a faim.
— J'ai mis des biberons dans la cuisine.

Il pénétra dans la pièce et observa Maggie, face au miroir, qui ajustait son tailleur rouge. Après quelques semaines de congés maternité, la voilà qui reprenait le chemin du travail. Maggie avait trouvé, sans grande difficulté, un poste dans le département des Sports Magiques du Ministère, qui l'attendait de pieds fermes depuis sa remise d'ASPICS. Ses grossesses successives avaient mis ce projet professionnel à mal, mais désormais, elle allait entrer dans la vie active, comme chargée d'études des plannings des matchs de Quidditch nationaux et internationaux sur le sol de Grande-Bretagne.
Elle se retourna vers Terry en lui présentant sa tenue.

— Comment tu me trouves ?
— Tu es ravissante... Comme toujours.
— J'espère que j'arriverai vite à me débarrasser de ces kilos en trop... ça me fait mal au cœur d'agrandir par magie ces si jolis vêtements.
— On est deux à devoir en perdre, ne t'en fais pas ! On s'occupera de faire un peu de sport quand on sera dans une période plus tranquille, si tu veux. Mais tu es belle comme tu es. Et dans cette tenue... j'ai envie de te dévorer.

Maggie rougit et pivota de nouveau vers sa glace pour arranger ses boucles blondes, maintenues derrière son oreille par sa barrette ornée d'un vif d'or. Puis, elle passa devant eux, déposa un baiser sur la tête de Shawn, puis un autre sur les lèvres de Terry.

— Je vais juste me mettre un peu de parfum. Tu peux aller chercher ce qu'il faut en bas. Tu sais où c'est ?
— Ma chérie. Je sais parfaitement comment tout est organisé. Je suis un père au foyer au top de la compétition !

Ils se sourirent avant de se séparer et Terry descendit les escaliers en chantonnant d'un air joyeux, bringuebalant Shawn sur son épaule. Il trouva ledit biberon dans le placard réfrigéré par un enchantement de froid et s'assit sur l'une des chaises de la cuisine pour donner à manger à son fils, qui ne se fit pas prier. Maggie craignait même parfois qu'il ne devienne glouton comme son père !
Pendant le repas de Shawn, une ombre apparut à la vitre et Terry reconnut aussitôt la petite Littleclaws, la vieille chouette des Whisper. Il reposa le biberon sur la table, essuya les lèvres de son fils qui râlait avec son bavoir et le repositionna sur sa large épaule pour faire coulisser la fenêtre. L'oiseau s'engouffra par l'ouverture et présenta la lettre mauve accrochée à la patte. Elle était adressée à Maggie. Cette écriture le fit sourire. Il savait de qui cela provenait.
Après avoir remercié Littleclaws avec une friandise, Terry retourna à l'étage, chargé de Shawn, retrouva Maggie, s'affairant toujours autour des derniers détails de sa tenue.

— Tu as reçu un courrier.
— Merlin, j'espère que ce n'est pas grave !
— Hm. Pourquoi ça devrait être grave ?
— Peut-être qu'en fait, je devais commencer hier et que j'ai tout loupé, et que je suis virée ?
— On est lundi, Maggie. Ils ne te feraient jamais débuter ton boulot un dimanche. Non. Ça vient de quelqu'un d'autre. Je te laisse en prendre connaissance.

Il tendit l'enveloppe colorée à sa femme et quitta la pièce pour aller changer Shawn dans sa chambre, tout en gazouillant pour le faire sourire.
Maggie aussi reconnut la calligraphie. Un temps, elle hésita à l'ouvrir. Peut-être valait-il mieux la déposer sur une commode et l'oublier là. Mais sa curiosité prit le pas sur sa méfiance. Ses doigts tremblaient sur le parchemin qu'elle déplia.

« Ma très chère Maggie,

Depuis que je suis petite, mes parents n'ont eu de cesse de me répéter que l'infime battement d'ailes d'un papillon pouvait déclencher les plus grosses tempêtes à l'autre bout du monde. Un acte anodin, un sourire, un regard, ou même un silence, peut avoir des conséquences bien plus considérables.
J'espère que cette lettre sera ce papillon.
Je suis rentrée d'Azkaban. Emeric est venu me chercher et nous sommes rentrés tous les deux chez mes parents. Ma petite sœur a bien grandi. Six ans, déjà. Le monde n'a pas tant changé en mon absence et la vie reprend son cours. Je vais bientôt retourner dans mon appartement sur le chemin de Traverse. L'école des Nettoyeurs a accepté de me garder malgré le fait que je ne maîtrise plus la magie. Mon père a beaucoup pesé dans la décision. Je ferai usage d'autres moyens, dirons-nous. Emeric doit encore valider un semestre aux États-Unis. Nous espérons qu'il pourra rentrer en Angleterre cet été pour commencer à chercher une maison, peut-être. Ou en tout cas un appartement plus grand que ma studette sous comble !
Néanmoins, je ressens comme un vide. Le monde n'a pas tant changé, en une année. Et au fond, mon cœur non plus. Je ressens les mêmes choses que le jour de mon incarcération. La veille de mon départ d'Azkaban, j'ai fait un rêve, peut-être un peu nostalgique, de nous en train de boire une boisson chaude à Pré-au-Lard. Et toi, qui pestais contre la Bièraubeurre. Et Terry, qui riait, qui te taquinait. C'était un doux rêve. Ce verre, j'en rêve toujours. Et j'espère qu'un jour, nous aurons l'occasion de le partager à nouveau. Demain. Dans un an. Quand nous serons vieilles et aigries. Le jour où tu accepteras de nouveau ma présence.
J'ai conscience que jamais tu ne pourras me pardonner et je le comprends. Je respecte ta douleur et personne n'est en mesure de faire un trait sur son passé et sur ces relations uniques, que l'on ne peut décrire mais qui nous forgent pourtant, parfois malgré nous. Je n'espère qu'une chose : que tu trouves le bonheur que tu mérites dans ta vie. Qu'il soit avec ou sans moi.
Je chérirai toujours le souvenir de notre amitié, qui a survécu, pendant longtemps, à tant d'événements. Tu m'as toujours répété qu'aucune magie ne nous séparerait. Et tu avais raison, c'est la réalité de la vie qui l'a fait. Mais j'ai bon espoir qu'un jour, la magie de notre relation permettra à nos chemins de se recroiser. Je t'attendrai.
Merci pour tout ce que tu as apporté dans ma vie. Je pense à toi tendrement.
Embrasse Terry et Shawn de ma part. Emeric m'a montré des photos. Vous êtes si beaux et si heureux tous les trois.
Kate »


Était jointe à la lettre l'une des photos animées que Kate avait récupérées de Suzanna. Ce cliché de leur groupe de trois, Kate qui riait aux éclats tirant la manche de Terry, qui quelquefois échangeait des regards avec Maggie, à sa gauche, à l'époque où ils entamaient à peine leur relation. Derrière étaient inscrits quelques mots à l'encre violette.

« En souvenir de nos sept années d'amitié qui m'ont marquée à jamais. Kate »

Une larme qui éclata au coin du cliché fit prendre conscience à Maggie qu'elle s'était mise à pleurer sans même le remarquer. Elle effaça le sillon humide d'un revers de main, maudissant Kate d'avoir probablement gâché le maquillage qu'elle avait mis du temps à perfectionner pour sa première journée de travail.
Son soupir tremblant résonna dans la chambre, alors qu'on entendait, plus loin, les gazouillis de Shawn et les rires légers de Terry qui devait le chatouiller. Puis, avec sa baguette magique sortie de la poche de sa veste de tailleur, elle accrocha la photo au coin du grand miroir, plus haut qu'elle ne l'était. Elle l'observa un temps, détaillant chaque expression des visages qui évoluaient avec joie. On pouvait presque entendre leurs rires lointains, encore enfantins, s'extraire du papier glacé.
Sept ans d'amitié, ce n'était pas grand-chose à côté de toutes les années qu'elle avait devant elle. Cependant, Maggie savait qu'aucune amitié en ce monde, même partagée sur des décennies, ne pourrait remplacer celle qu'elle avait partagée avec Kate. Elle n'avait pas encore la force de lui pardonner ce jour-là. Mais elle se disait qu'en posant les yeux tous les jours sur cette photo, cela finirait par la convaincre de trouver le courage d'aller de l'avant.
Elle quitta la chambre, la lettre mauve de Kate, posée sur la commode, frémissant à cause du petit courant d'air.
C'était bien une tempête qu'elle avait déclenché dans le cœur de Maggie.

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Note : j'espère que cette partie VIII vous a plu.

Je vous posterai un "chapitre" exprès pour les derniers remerciements, les dernières remarques (ET TRES IMPORTANTES, puisque le coffret LMA en version imprimée va sortir... ! Vous pouvez d'ores et déjà remplir le formulaire : https://forms.gle/J5W2dPGM9oE4Y4pi8)

Et un autre, avec "Ce qu'ils deviennent" pour ceux qui sont intéressés ! ;)

D'ici là, remettez-vous de vos émotions... LMA, c'est fini.

Ludo Mentis AciemOù les histoires vivent. Découvrez maintenant