Chapitre 4 - Jus de citrouille

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À la plus grande déception des élèves de première année, le professeur de Défense contre les Forces du Mal ne répondait pas aux critères de leurs rêves les plus fous. Il s'agissait d'une vieille sorcière rabougrie, d'origines irlandaises – cela se remarquait à son accent, sa peau très pâle, creusée, et à son imposante chevelure bouclée d'un roux terni –, au sourire pourtant intact, répondant au nom de Miss O'Joovens. Sa décoration personnalisée de la salle de classe rappelait les rites moldus consistant à appeler les démons. Des pentacles brodés ornaient les grandes tapisseries pourpres, des mobiles en verre et en argile avaient été suspendus tout le long de la descente d'escaliers qui menait au bureau et un crâne animé surveillait les élèves depuis l'une des étagères. Et contrairement à ce que tous auraient pensé, son cours était aussi palpitant qu'une course de crapauds cornus, malgré la sympathie de ce nouveau professeur. Mais ce dont aucun ne se doutait, c'était que Miss O'Joovens ne faisait office que d'enseignante en matière de théorie, non référente du poste. Et que le professeur responsable des travaux pratiques ne s'était pas encore présenté à ce jour...
La surprise fut de taille, un lundi matin pluvieux du mois d'octobre. Les premières années attendaient à leurs bureaux, déballant leurs affaires nécessaires pour le cours, parchemins, plumes et bouteilles d'encre. Leur première constatation fut que les lourds rideaux de feutrine rouge avaient été ouverts. Ils avaient pris l'habitude de l'obscurité de la pièce lorsqu'officiait Miss O'Joovens, qui n'éclairait la classe qu'à l'aide de lugubres cierges noirs lévitant à la manière des bougies de la grande salle. Un courant de chuchotis curieux traversa la classe, composée des quatre maisons. Comme depuis plusieurs semaines lorsque les répartitions de cours le lui permettait, Kate s'assit aux côtés de Morgana. Elle eut à affronter le regard offensé de Maggie, le même que sa camarade lui adressait depuis la rentrée. Qu'avait-elle donc à lui en vouloir à ce point de lui préférer la présence de Morgana, bien plus aimable et compréhensive que cette garce arrogante et égoïste ? Kate ne répondit à son regard noir que d'un simple hochement de tête, avant d'arranger ses affaires sur son bureau.

— Ca ne va pas ? s'inquiéta Morgana en constatant la mine défaite de son amie.
— Rien, ne t'en fais pas...

Le retard du professeur fit gronder le brouhaha ambiant. Certains en profitèrent pour plaisanter, s'envoyer des bouts de parchemins et lancer de petits sortilèges malicieux. Soudain, la porte de classe s'ouvrit avec brusquerie.

— E-excusez mon retard !

Le jeune homme traversa la classa avec précipitation tout en retirant sa veste, sous le regard médusé et collectif des élèves. Tous avaient cessé leurs jeux, leurs discussions, leurs yeux ébahis rivés sur le nouvel arrivant. Ce dernier, d'un coup adroit de baguette magique, envoya son manteau se suspendre de lui-même sur le porte manteau. Puis, se retournant vers l'assemblée des enfants, il rajusta ses lunettes rondes par-dessus son sourire gêné, avant de frapper dans ses mains sans réellement savoir que prononcer dans de telles circonstances :

— Bien... Pour rattraper mon retard, je pense qu'il est inutile de nous attarder sur ma présentation et...

Une main fébrile se leva au milieu des élèves abasourdis, que le jeune enseignant autorisa à prendre la parole d'un abaissement de menton :

— La Gazette du Sorcier disait que... que vous vouliez devenir Auror, pas professeur ! C'est normal ?
— C'est le cas, répondit-il en se raclant la gorge. J'étudie pour devenir Auror, c'est pour cette raison que je suis fort occupé en dehors de mes rares heures de classe. Mais en parallèle, le professeur McGonagall m'a proposé de vous dispenser des cours contre les Forces du Mal, du moins une année, le temps que Poudlard se remette des récents événements et puisse s'organiser par la suite. D'après ces dires, je serai... le mieux placé pour le faire. J'ai accepté, à condition de ne diriger que les travaux pratiques, ce qui consiste à l'essentiel de cette matière. Sans quoi, elle n'aurait pas grand intérêt, selon moi...

Ludo Mentis AciemWhere stories live. Discover now