Chapitre 36 - Rends-moi ce qui m'appartient

2.1K 158 30
                                    

« — Merci d’être venue si vite. Cliodna... »

Cliodna. Le nom résonnait encore dans sa tête lorsque Kate émergea de son sommeil. Le rêve se répétait de manière inlassable, nuit après nuit, se coupait toujours au même moment. La druidesse ne cessait de hanter la jeune fille, sans qu’elle n’en comprenne le sens. Tout avait l’air si réel.

Mais ce matin se trouvait l’occasion de balayer une fois pour toutes ces pensées : Noël était arrivé. Kate soupira cependant en constatant qu’il n’était qu’à peine sept heures du matin. Ses parents n’allaient sûrement pas se lever si tôt, sauf si Abby décidait de pleurer un bon coup. Cela lui parut, un instant, être un plan judicieux. Avant qu’elle ne se persuade qu’elle n’était pas si cruelle.

Kate fit donc preuve de patience, en boule dans son lit. Remarquant son éveil, Mister Minnows trouva là le juste moment pour réclamer à ce qu’elle lui ouvre la porte, mais elle avait pour ordre de ne pas le laisser sortir. Impertinent qu’il était, le félin restait tout à fait capable de se faire les griffes sur les cadeaux de Noël, comme grattoirs de luxe. La jeune fille dut donc supporter les lamentations de son chat, qui se roulait sur le parquet, jusqu’à ce qu’elle entende du bruit dans le couloir. Kate bondit sur ses pieds et en profita pour sortir, non sans hâte, suivie par le trot de Mister Minnows.

— Attends-nous pour ouvrir les cadeaux, lui lança sa mère, les cheveux en pagaille et le regard encore lourd, qui s’en allait chercher Abby, tandis que Kate dévalait les escaliers comme une furie.

Noël restait l’un des rares moments où Kate se permettait de garder son âme d’enfant qu’elle avait de plus en plus tendance à renier. La même joie grandissait dans son cœur, alors qu’elle devinait la couleur des emballages derrière la porte vitrée ondulée, surmontés par les éclats des décorations qui ornaient le sapin. Cependant, en écartant la porte, une surprise sauta aux yeux de Kate, qui passa du bonheur à l’ébahissement. Car à côté du sapin se tenait un bien étrange cadeau, tout empaqueté et enrubanné. Mais sa grande forme laissait deviner son contenu.

— Je n’y crois pas... ! lâcha Kate.

La jeune fille se précipita vers son présent, au pied duquel s’était accumulé une petite pile de cadeaux, envoyés par ses amis et disposés par ses parents. Cependant, sur le moment, seul le plus imposant accaparait son attention. Au bout d’une ficelle pendait un petit mot :

« Attends-nous pour l’ouvrir ! Papa »

Mais Kate ne pouvait tenir en place. Elle le manipula entre ses mains, tentant d’en tâter les formes à travers l’emballage. Son excitation fut telle qu’elle n’entendit pas ses parents descendre de l’étage.

— Bon, déjà, elle ne l’a pas ouvert ! constata Phil, satisfait.
— Je peux ? Je peux ?! s’exclama-elle. 

Phil partagea un coup d’œil avec sa femme, qui s’était assise sur le canapé, Abby sur ses genoux, qui s’amusait avec les pans de la robe de chambre en soie de sa mère.

— C’est ton cadeau, chéri, lui fit-elle remarquer en hochant la tête.
— Allez, ouvre-le. Sans l’abîmer. Joyeux Noël.

Lâchant des petits cris de joie, Kate posa son cadeau au sol, pour mieux pouvoir le déballer. Lire son euphorie sur son visage réchauffa le cœur de son père, qui ne regretta pas un instant de le lui avoir offert, si le prix en était cette sensation.

— Il est... tellement beau !

Au milieu des papiers déchirés, Kate fit rouler en douceur le manche de son balai neuf, pour mieux en étudier chaque détail, de la gravure argentée aux fils métallisés qui engonçaient les brindilles taillées en une espèce de forme lunaire. Le Fuselune paraissait encore plus parfait de près qu’à travers la vitrine du Chemin de Traverse. Au-dessus de l’épaule de sa fille, Phil guettait chacune de ses réactions.

Ludo Mentis AciemWhere stories live. Discover now