Chapitre [48]

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Junot était debout sur le port, observant comme hypnotisé les soldats et les barriques vides descendre du pont des navires. Le vent soufflait et faisaient coller de ses mèches blondes sur son visage. Le ciel, quant à lui, était on ne peut plus découvert, et son bleu intense se mariait avec celui de la mer, plus foncé. Les cris des mouettes accompagnaient d'ailleurs le bruit répétitif des vagues qui s'écrasaient sur les rochers.

- Tout cela n'est que le début d'un grand et long voyage, dit Murat avec un sourire tout en le rejoignant, le coupant de ses pensées.

- Hm? Oui, en effet... j'aurais aimé visiter cette île, ou juste La Valette, mais je crains que nous n'en ayons pas le temps, soupira-t-il en jetant un œil en arrière vers la citadelle.

- C'est bien dommage en tout cas. Et ce fort, ces fortifications... c'est magnifique et assez spectaculaire.

- Magnifique? Tu en as de ces mots! Je te rappelle que nous devons nous tenir prêt à les bombarder, tes fortifications, si on ne nous refile pas les clés de la ville pour nous ravitailler!

- Il... Il doit bien y avoir une solution par les dialogues...!

Leur conversation fut interrompue par un cri de rage dont on eut aucun mal à définir la source.

Alors que Napoléon tournait presque en rond, les mains derrière le dos et clairement irrité, les deux jeunes hommes le rejoignirent, intrigués.

- L'approvisionnement est-il impossible, mon général? Demanda Murat qui redoutait la réponse.

- Impossible, n'est pas français! Ils vont m'entendre! S'écria le Corse en lui lançant un regard noir. Ces abrutis de Maltais ne veulent pas nous réapprovisionner en eau, ni nous ouvrir les portes de la ville, et en plus de cela, ils ne veulent pas non plus de nos navires dans leur port!

- Mais pourtant tous nos navires y sont, dans le port, dit inconsciemment Junot, ce qui énerva encore plus son interlocuteur qu'autre chose.

- Je le sais très bien!!

- Qu'allez-vous faire, alors? Il n'y a pas d'autres îles semblables en Méditerranée...

- Et c'est avec cet esprit que tu veux monter en grade?! J'ai décidé que nous allions envahir Malte. Et puis cela donnera une leçon à ces prétentieux d'anglais. D'ailleurs, le Directoire m'en a donné l'autorisation.

Junot se rendit compte que son cher général n'avait pas attendu cette histoire de barrique pour choisir de prendre Malte au passage. Il se demandait d'ailleurs comment il avait bien pu avoir l'autorisation du Directoire si vite. Ou alors, il l'avait prévu?

- Mais, mon général, c'est aussi et surtout le domaine des chevaliers teutoniques... nous ne pouvons pas... renchérit timidement Murat.

- Eh bien maintenant ils seront à nos ordres! Et c'est à toi, mon cher Junot, que j'ai décidé de donner la mission de leur mener ce message. Je leur y laisse une chance. Une seule.

Il sortit une lettre de sa poche, lettre qui visiblement avait été écrite il y a plusieurs jours.

- Pourquoi à moi?

- Sois-en honoré au lieu de poser des questions inutiles! Hâte-toi d'aller porter cela au Grand-Maître... et dis-lui que nous ne sommes pas très patients.

- "Grand Maître"... ça fait très franc-maçonnique, comme nom...!

- Peu importe!! Vas-y!!

Il gonfla les joues d'un air boudeur, et parti exécuter son ordre.

Une fois devant la grande porte, imposante et lourde, il leva la tête comme s'il espérait y trouver quelqu'un.

- Hum... Je viens en paix! Tenta-t-il. Je voudrais voir le Grand Maître!

Folie rime avec irréfléchiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant