Chapitre [99]

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Francesco essaya de bien refermer la porte. Sans succès. Il tenta de mettre la clé dans la serrure mais ce ne fut guère mieux ; elle pouvait à peine y rentrer. Il grogna et donna un coup de pied dedans, avant de se retourner en entendant quelqu'un.

- Que faites-vous à ma porte là?! Vous allez me la repayer si vous la cassez!!

Il vit la propriétaire au bout du couloir, dans l'escalier, petite femme ronde aux cheveux noirs, avec un panier rempli à ras bord de linge dans les mains.

- Il faudrait déjà qu'elle ait été en bon état lorsque vous aviez commencé à nous louer cette chambre!! Railla Francesco sans aucune sympathie.

- Insinuez-vous que je tiens mal les lieux?!

- Non, mais vous vous tenez mal tout court!! Qu'est-ce donc que ces manières d'agresser vos locataires de bon matin?!

- Quel impertinence, jeune homme!! C'est vous qui avez le culot d'agresser cette pauvre porte qui était pourtant en si bon état!!

- C'est votre vue qui ne doit pas l'être, en bon état, pour ne pas avoir remarqué auparavant que cette porte était cassée!!

- Vous avez déjà de la chance que je ne vous jette pas hors de chez moi avec vos retards de loyer et le bruit que vous faites toute les nuits, alors n'en rajoutez pas!!

- Le bruit... mais il y a tout le temps du bruit, ici, à Paris!!

- Certes j'en ai entendu des ivrognes, mais votre ami qui hurle et chante à une heure du matin et qui dégueulasse mon palier avec son vomi, je m'en passerais bien!! Et je ne compte pas non plus toutes les fois où vous ramenez des catins et combien leur cris résonnent dans la maison!!

- Des... pour qui nous prenez-vous?! Je vous signale, Madame, que je suis quelqu'un de respectable, et mon compagnon ne l'est peut-être pas autant que moi, mais il n'en ramène plus ici depuis longtemps!!

- Et hier soir alors, c'était quoi tous ces cris qui ont duré toute la nuit?! J'ai eu beau frapper à votre porte, rien, et cela n'a cessé que vers cinq heures du matin, au lever du jour!! Vous m'expliquez si ce n'était pas des catins?!

- Hier soir, Madame, j'ai fait l'amour à mon ami toute la nuit! Sur ce, passez une bonne journée.

- Oh, Seigneur! Vous...!!

Francesco disparu dans la cage d'escalier avec un grand sourire aux lèvres. Peut-être que maintenant, elle allait enfin leur foutre la paix!

Une fois dans la rue, notre napolitain se dirigea vers son endroit favori. Quelques pas et il pénétrait dans l'auberge de son amie.

- Bonjour, Marie! S'exclama-t-il avec un grand sourire.

- Tiens, bonjour, Francesco. Tu es bien matinal.

- Oui, à vrai dire je n'ai pas dormi de la nuit, et j'avais envie de venir de voir.

- C'est très gentil à toi. Je n'ai pas beaucoup de travail encore. Toutes les filles dorment, tu te rends compte... quelles paresseuses. Tu peux m'aider à plier ce linge?

- Oui, bien sûr! Mais il faut les comprendre aussi, elles travaillent toutes la nuit.

- Oui. Et certaines sont si jeunes... à leur âge, j'allais encore me cacher derrière les arbres des Champs-Elysées pour voir passer les beaux jeunes hommes nobles.

- Et est-ce qu'elles sont heureuses?

- Certaines, oui. D'autres, non. La plupart s'en fichent, tant qu'elles ont à manger le soir. Mais je crois que beaucoup... attendent l'homme idéal et riche qui les sortira d'ici pour faire d'elles des trophées au corps squelettiques qui n'auront pas le droit de s'exprimer en public.

Folie rime avec irréfléchiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant