Chapitre [35]

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Junot était assis au bord de la Seine, et était occupé à pêcher avec une canne à pêche qu'il avait fabriqué avec un bout de bois et du simple fil qu'il avait trouvé chez la couturière du coin, et, étonnamment tiens, il n'avait fait aucune prise alors qu'il était installé depuis la matinée.

Faisant la moue, il remarqua son général qui marchait plus loin, et l'appela à grands cris.

- Oh, bonjour Junot. Que fais-tu ici, seul?

- Eh bien, comme vous le voyez mon général, je pêche. Et vous, d'où revenez-vous...?

- Vois-tu, pendant que tu paresses, j'élargis mon cercle de contacts.

- Je ne paresse pas, j'apprends la patience! Et à quoi cela va-t-il vous servir?

- Oh, à bien des choses, mon cher Junot. Et si tu crois que je ne fais que ça, c'est que tu t'intéresses bien peu à mon travail.

- Racontez-moi donc ce à quoi vous passez vos journées, alors.

- Non, c'est confidentiel. Et ce n'est pas important pour toi de le savoir. Sache juste que des bruits courent, les royalistes prépareraient une insurrection... et ce ne sont pas que de simples rumeurs. L'on m'a adjoint au commandement de Barras. Je crains que Paris ne soit à nouveau en feu...

- Alors je serai de ceux qui en alimenteront la braise!

- Je préfèrerais... que tu restes à l'hôtel, et que tu ne sortes pas.

- ...Comment? Mais, je suis votre aide-de-camp! Il est hors de question que je ne me cache comme un lâche!! Je suis né pour faire la guerre!

- Ça, je n'en doute pas...

- Je viendrai avec vous!!

- Non, Junot. Et c'est un ordre.

- Mais...

- Tu connais la guerre, Junot, j'en conviens ; mais se battre sur un champ de bataille n'a absolument rien à voir avec des combats entre les étroites rues de Paris. Ta fougue et ton courage ne seront pas la clé ; ici c'est une histoire de stratégies et de tactique, et d'habileté.

- Vous pensez donc que je suis sot et brute?

- ...non, absolument pas...! Seulement... tu es forcé de reconnaître que peu importe les directions que je te donne, tu finis toujours par en faire fi et à opter pour t'engager sans réfléchir dans le combat.

- C'est que... je veux en finir au plus vite!

- Ah, c'est certain qu'ainsi, tu en auras vite fini.

- Je parlais de vite en finir avec l'ennemi!

- J'avais compris... enfin, quoi qu'il en soit, Junot, tu ne bougeras pas de la chambre si cette révolte a lieu, ce qui sera d'ailleurs très probable. Muiron viendra avec moi. Quand à Marmont, Il pourra rester avec toi, si tu le souhaites.

- ...Pourquoi Muiron a-t-il le droit de vous suivre et pas moi?!

- Parce que c'est ainsi, ne discute pas.

- Vous tenez donc si peu à moi pour m'abandonner...

- ...Junot... c'est justement... parce que je tiens à toi que je préfère que tu restes ici en sécurité...

- En sécurité?! Vous me promettez et répétez sans cesse que lorsque vous partirez à la guerre, je serai le premier que vous prendrez avec vous! Et vous ne voulez même pas que je vous accompagne pour combattre à l'autre bout de la ville?!

- Si je dois te voir mourir, je préfère largement que ce soit lors d'une glorieuse et victorieuse bataille que durant une bête insurrection. Enfin, ne parlons plus de mort. J'ai du travail, je dois ramener ces papiers au Comité de Salut Public. Nous nous verrons ce soir.

Folie rime avec irréfléchiWhere stories live. Discover now