Chapitre [82]

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Il était vraiment parti.

Sans lui.

Et avec tous les autres.

Et le pire, c'est qu'il n'avait pas laissé derrière lui quelques généraux, mais l'armée entière, qui était privée de flotte depuis Aboukir et forcée de rester en Égypte. Voilà, il était un lâche. Il était parti pour soi-disant aider la France qui se faisait envahir de toutes parts... il ne pouvait juste pas assumer le bordel qu'il avait foutu en Égypte, oui!!

Tremblant, Junot peinait encore à retenir ses larmes.

La guerre... avait-elle donc tant changé son général en chef? Elle ne l'avait pas changé lui, alors pourquoi... son général bien-aimé...

- Mon général, le général en chef Bonaparte m'a chargé de vous faire part de cette lettre.

- DONNE-LÀ MOI!!

Junot la lui arracha des mains et l'ouvrit comme si elle contenait toutes les solutions à ses blessures intérieures.

Sa mine se décomposa au fil des mots qu'il lut.

"Lorsque tu recevras cette lettre, je serai bien loin de l'Égypte. J'ai regretté de ne pouvoir t'emmener avec moi, mais tu t'es trouvé trop éloigné du lieu de l'embarquement. J'ai donné l'ordre à Kléber de te faire partir dans le courant d'octobre. Enfin, dans quelque lieu et dans quelque circonstance que nous nous trouvions, crois à la continuation de la tendre amitié que je t'ai vouée.

Ton éternel ami,

Bonaparte."

Junot tomba à genoux.

Cette fois, le chagrin ne put s'empêcher d'éclater.

Tant de choses fausses dans cette lettre... tant de choses non expliquées...

Il était détruit de l'intérieur et rien ne pouvait le réparer à part la présence de son supérieur, son ami, son aimé.

Et pour une fois, c'était chose bien impossible.

Il pleura toutes les larmes de son corps, jusqu'à tomber de fatigue et s'endormir.

~ ☘ ~

Malheureusement pour Junot, son retour en France ne se fera pas aussi vite que prévu. À peine son navire avait-il quitté le port que des navires anglais le bloquèrent, et il fut fait prisonnier comme le reste des voyageurs.

Il passa ses journées à tourner en rond, menaçant de se jeter du haut du pont quand il n'était pas en train de faire une crise de larmes.

Au bout d'à peine un mois, le navire qui le transportait fit escale à Palerme, sur la côte sicilienne. Allait-on enfin l'échanger contre d'autres prisonniers et lui rendre sa liberté? Que nenni, sinon ce ne serait pas drôle.

Il fallu au moins trois hommes pour le maintenir et le faire avancer, tant il se débattait en descendant du navire. Une fois sur terre, ce ne fut guère mieux, il était devenu une véritable furie.

- Laissez-moi... LAISSEZ-MOI PARTIR!!

- Quel diable que ce prisonnier!! Ne peux-tu pas te tenir tranquille maintenant que nous sommes à terre?!

Le climat sicilien n'avait pas l'air d'avoir calmé notre bourguignon. Il continua de se débattre comme il pouvait, au grand malheur des trois soldats anglais qui tentaient tant bien que mal de le retenir.

- LÂCHEZ-MOI!! JE VAIS TOUS VOUS TRANCHER LA TÊTE, ET JE FUSILLERAI VOTRE CORPS JUSQU'À CE QU'IL NE SOIT PLUS QU'UNE MARE DE SANG!!!

- Que se passe-t-il ici...?

Folie rime avec irréfléchiWhere stories live. Discover now