Chapitre [166]

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En plein pays Autrichien, celui qui était aux premières loges du spectacle qui allait commencer, c'était notre cher empereur, qui de son cheval observait ses hommes au loin de sa longue vue.

Pour une fois, son armée était positionnée exactement comme il l'avait ordonné, et formait un assortiment bleu et blanc de petits soldats bien rangés à l'ouest de la plaine.

En revanche, à l'est, étaient réunis un regroupement hasardeux de soldats aux uniformes variés qui avaient refusé de porter l'uniforme choisi par la coalition, par profond nationalisme.

Le Corse haussa un sourcil en se concentrant sur eux. Ils paraissaient dispersés. Si seulement cette longue-vue permettait aussi d'entendre...

- D'toutes façons, les hongrois comme vous, ça sait même pas se battre!!

- On avait pas le choix, c'est pas de notre faute si les sales Autrichiens de votre race ont toujours besoin de notre aide!! C'était comme 'y a cinquante ans!! Vous savez pas vous battre seuls!! Sale couards!!

- Et le couard, tu veux le voir te foutre un poing dans la gueule!!??!

- Je proteste, nous aussi nous avons été enrôlés de force!! s'écria un polonais.

- Quand on a même pas de pays et même pas de souverain, on la ferme!!

- Et à cause de qui??! Vous nous avez tout pris, sales chiens d'Autrichiens!!

Et ça y est, l'un avait sauté sur l'autre, la baston s'était engagée sans attendre l'ennemi pour s'amuser. Les russes, à qui tout ce beau monde était aussi mélangé, ne comprenaient rien non plus.

Du côté français, on voyait ça de loin, et on était perdu, sauf Junot qui s'était mis à rire aux éclats et qui était bien le seul. Murat, à ses côtés, était effaré et ne savait pas quelle manœuvre engager. En fait, tous étaient égarés et ne se souvenaient même plus des ordres de leur empereur. Ah, ils étaient beaux les maréchaux d'Empire. Seul Ney, qui voyait la scène sous un autre angle, se massa les yeux puis préconisa à ses soldats de se retirer un peu en arrière.

Et un homme quelconque cria, et tout commença.

- À gauche, Murat, marmonna l'empereur. Ah, mais quel idiot!!!

Lorsque la bataille fut engagée, ce fut un vrai brouhaha, et pas qu'à cause du combat. Entre les polonais et les autrichiens qui se battaient entre eux et les français qui confondaient leur droite et leur gauche et fonçaient dans le tas, ah, c'était beau, Austerlitz.

Napoléon soupira. Encore une fois, des heures de réflexion pour une stratégie que presque aucun n'aura pu suivre. Il n'avait plus qu'à compter sur sa bonne étoile.

~ ☘ ~

La bataille avait été un vrai carnage, un vrai bordel aussi, mais avait tout de même décrétée victoire française. Mais ne nous penchons pas là-dessus ; allons plutôt voir la tente de l'empereur, qui y tournait en rond depuis déjà une bonne heure.

Il avait été chanceux, et n'avait perdu aucun de ses proches. En particulier Junot, qui s'était élancé comme un fou dans la bataille... Pour ne rien changer. Dieu sois loué, il n'avait même pas une égratignure. C'était un véritable miracle. Déjà, quel abruti était-il pour l'avoir rejoint à la guerre... d'un côté, cela le terrifiait, que Junot soit capable de faire Lisbonne-Austerlitz seul en cheval pour le rejoindre, mais de l'autre, il était flatté. Il sourit en coin. Que n'était-il pas fou...

Il était si concentré dans ses cent pas qu'il ne remarqua pas Murat entrer dans sa tente. Celui-ci était encore vêtu de son uniforme, sans aucune tâche, comme au début de la bataille. Néanmoins, sa mine n'était plus aussi enjouée. Il fixait le sol, dépité comme s'il ressentait le poids des morts sur ses épaules.

Folie rime avec irréfléchiWhere stories live. Discover now