Chapitre [176]

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Sébastien regarda ses bottes. Et les manches de son uniforme. Et son fusil qu'il tenait d'une main, cette arme meurtrière qu'il aimerait jeter bien loin. Depuis combien d'années ne les avaient-il pas revêtis...? Pas assez à son goût.

- Francesco... es-tu sûr... de vouloir repartir faire la guerre...?

C'était un peu trop tard pour demander ça, vu qu'ils étaient tous deux en marche au milieu d'un bataillon et qu'ils venaient de quitter Paris, mais Sébastien ne pût s'empêcher de poser cette question une énième fois, comme s'il espérait enfin entendre un "non".

Le napolitain le toisa du regard.

- OUI. Et tu m'as promis de me suivre, non??!!

- O... Oui... est-ce... à cause de la prise de Naples... que tu as voulu te ré-engager...?

Il n'eut pas de réponse, mais il prit l'expression énervée de Francesco comme un oui.

- Tu sais que... ce n'est pas en joignant une autre campagne... que celle de Naples va s'arrêter...

- Mais j'ai besoin de me défouler. Et puisque je ne puis pas me rendre à Naples pour me battre contre les français, alors je pars au Portugal avec le général Junot. Seul le voir... parviendra à me calmer... aussi, m'éloigner de Paris m'empêchera de commettre le meurtre d'un souverain.

- Francesco...

Sébastien enlaça discrètement sa main dans la sienne. Puis il s'aperçut que malgré ses paroles, Francesco tremblait légèrement et tentait de ravaler ses larmes. S'ils n'étaient pas en pleine marche, il ne se serait pas privé de le serrer le plus fort possible dans ses bras. Il serra seulement sa main et lui envoya un regard qui se voulait réconfortant.

Il le suivra partout. Toutes ces années, il l'avait protégé. Maintenant, c'était à son tour de le faire.

~ ☘ ~

- Francesco... est parti...?

Arnaud se mit à trembler. Il dut se contenir de toutes ses forces pour retenir ses larmes.

- Oui... il est parti ce matin, mon garçon.

- Je... Je n'ai même pas pu lui dire au revoir...

D'un air compatissant, Marie s'approcha et mit sa main dans la poche de son tablier, pour en ressortir une lettre.

- Il a laissé ça pour toi.

Arnaud la prit, tremblant encore plus. Il l'ouvrit et commença à la lire, se mordant la lèvre.

- Alors, que dit-il?

- Il me dit... d'être d'un bon garçon, que je dois continuer à lire et à apprendre... et que je ne dois pas m'inquiéter, qu'il part à la guerre mais qu'il... qu'il reviendra vite...

Les larmes coulèrent aussitôt, il n'arrivait plus à les contenir. Il pleurait sans plus aucune retenue, et Marie vint le prendre dans ses bras.

- Arnaud... mon garçon...

- ...Marie... la guerre... c'est horrible..!! Francesco... papa...! Il m'a promis qu'il n'irait plus! Il devait s'occuper de moi!

La jeune femme lâcha un léger soupir.

- Arnaud... tu sais, Francesco est avant tout un soldat... et s'il est parti maintenant, c'est car il a jugé que tu étais assez grand pour ne plus avoir besoin de lui...

- Mais... je ne le suis pas! Je ne le serai jamais! Je veux qu'il revienne!

Elle lui embrassa le front.

- Il va revenir. C'est Francesco, il s'en sort toujours, n'est-ce pas? N'a-t-il pas combattu vaillamment et triomphé en Égypte? Il sera de même pour le Portugal.

- C'est... au Portugal qu'il est parti...? C'est où...?

- C'est à côté de l'Espagne. Il a suivi le général Junot.

- Le général Junot... il l'aime beaucoup...

- Oui, alors il est heureux de pouvoir le suivre encore une fois.

- Papa... je vais aller lui écrire tout de suite! Je vais répondre à sa lettre et l'écrire tout seul!

- C'est bien, mon garçon! L'encouragea-t-elle en lui ébouriffant les cheveux.

D'un pas déterminé, il monta les escalier et alla s'enfermer dans sa chambre.

Marie l'observa faire en croisant les bras.

Pauvre enfant... il était capable d'avoir encore de l'espoir, lui.

Folie rime avec irréfléchiWhere stories live. Discover now