Chapitre [183]

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Novembre 1808

Junot avait enfin pu revoir son général tant aimé. L'empereur, qui revenait de Prusse, n'était retourné à Paris qu'en début de novembre. Depuis son retour du Portugal, Junot qui était retourné à Paris, avait dû attendre son retour. Si l'on oublie l'absence de son général, il était heureux d'être revenu et de revoir ses filles, et de pouvoir passer du temps avec elles. Sa femme était bien venue avec lui au Portugal, elle avait même donné naissance à leur second fils, qu'ils avaient directement appelé Andoche, comme son père (le pauvre enfant). Mais peu importe. Ses filles passaient bien avant sa stupide femme et ce nourrisson. Elles avaient tant grandi... Quant à son premier fils, qui n'avait que deux ans, il ne voulait guère s'en occuper. Enfin, son premier fils légitime, si l'on écarte Othello. Il devait être grand maintenant, lui... Il serait curieux de le revoir, même si le retrouver sera encore plus difficile que de chercher une aiguille dans une botte de foin.

Étrangement, même si dans ses lettres l'empereur blâmait Junot sur tous ses choix politiques et militaires - en particulier ce foutu accord qu'il avait signé avec les anglais -, lorsqu'il l'avait enfin en face de lui, il s'abstenait d'évoquer tout sujet sur cette malheureuse campagne. Comme s'il voulait l'oublier, oublier qu'il avait perdu contre ces misérables britanniques, qu'il s'était fait humilier, qu'il avait envoyé son amant bien trop loin de lui. Et puis, peu importe le Portugal, maintenant qu'il avait consolidé son alliance avec la Russie, c'était ça qui comptait. Même s'il avait un mauvais pressentiment concernant cette alliance...

Dès qu'ils s'étaient retrouvés en privé, ils avaient sauté dans les bras l'un de l'autre. Une fois de plus, après de tumultueuses disputes, ils se pardonnaient.

Ainsi ils se trouvaient dans son bureau, ce bureau dans lequel ils avaient passé tant de temps.

Le Soleil d'au-dehors éclairait entièrement la grande pièce, sauf un coin près de la porte où siégeait un fauteuil rose.

Junot était couché sur un canapé, le seul de la pièce, et observait son amant ranger des livres sur une étagère.

Napoléon posa un dernier ouvrage et, après avoir pris une grande inspiration, brisa le silence.

- J'ai décidé... de divorcer de Joséphine. Pour de bon.

- Ah, enfin!! Il en a fallu des années!!

Son visage s'illumina. Enfin, il allait abandonner cette catin qui n'en voulait qu'à son argent!! Il allait n'être qu'à lui!!

- Il me faut me remarier pour avoir un héritier.

Raté. Son visage se décomposa.

- Ah... mais enfin...!!

- C'est la France qui le veut, mon cher Junot. J'ai déjà envoyé des lettres à plusieurs princesses. Nous allons en profiter pour nouer une alliance politique. J'avais demandé à la princesse Catherine, la sœur du tsar de Russie, mais elle est malheureusement déjà fiancée...

Junot ne retint que la première partie de la phrase.

- La France?! Dire qu'il y a cinq ans vous n'en vouliez pas, de la France!! Et maintenant vous la faites passer avant tout!!

- J'ai dû m'adapter. Peut-être était-ce mon destin...

- Alors... mon amour pour vous ne vous est vraiment pas important...

L'empereur soupira.

- Junot... ne dis pas de bêtises. C'est mon devoir que de faire un héritier.

- D'habitude, ces paroles sont plus attribuées aux femmes.

- Peu importe, je le dois.

Le bourguignon se leva et s'approcha de lui.

Folie rime avec irréfléchiWhere stories live. Discover now