Chapitre 14 : Première Partie

1.6K 203 15
                                    

Choros.

Il ne restait plus que lui près de la tombe. Il regarda la pierre rectangulaire sur laquelle étaient écrits le nom, la date de mort et de naissance de Kira. Les fleurs qu'il avait déposées la veille étaient encore bonnes, mais il fit apparaitre un nouveau bouquet. En tant que chevalier de l'espace, il pouvait transporter des objets d'un endroit à un autre. C'était pratique. Il déposa le nouveau et reprit l'ancien. L'odeur commençait à s'atténuer et Kira n'aimait pas l'odeur des fleurs fanées. Elle disait que sentir l'odeur de la mort n'était pas bon pour le moral. Il sourit en repensant à sa petite moue quand elle jetait un bouquet de fleurs

Il posa la main sur sa tombe et la caressa, comme il le faisait avec sa tête quand elle était encore vivante. Dieu qu'elle lui manquait....

- Choros... Tu l'aimais n'est-ce pas ?

Il se retourna surpris. Il pensait être le dernier. Il vit la princesse se tenir là, à l'ombre de son ombrelle saumon. Elle semblait tellement fragile et la chaleur la rendait faible. Malgré ça elle était restée. Pourquoi ?

- Comment avez-vous deviné ? demanda-t-il légèrement surpris

Elle soupira et regarda au loin, vers le ciel. Ses beaux yeux gris s'assombrirent.

- Parce que moi aussi, j'avais ce regard...

Le vent se leva doucement et vint charroyer des feuilles mortes. Le silence était retombé et il se retourna vers la tombe, mué par une envie de vider son cœur.

- Oui je l'aimais, mais elle faisait partie de ma famille. Elle était une sœur... Et puis Kaï ne me l'aurait jamais permis. Il la surprotégeait, l'empêchant de fréquenter les garçons hormis lui et moi. C'était un vrai grand frère poule, dit-il en riant.

- Je vois. Mon frère est un peu pareil, répondit-elle avec un rire nostalgique.

- Vous voulez parler du prince Adam ?

Elle hocha doucement la tête. Il se demandait ce qu'il était advenu de lui. S'il était comme Kaï, il n'aurait pas laissé sa petite sœur aux mains d'étrangers.

Il repensa à Kira. C'était vrai il était fou d'elle. Et elle aussi. Ils étaient obligés d'avoir une relation en secret pour ne pas s'attirer les foudres de Kaï et de ses parents. Les gens de la ville étaient persuadés qu'ils étaient frère et sœur, si quelqu'un apprenait leur relation, ils auraient choqués les bonnes mœurs. C'était un amour douloureux mais magique à la fois. Chaque moment passé seul ensemble était plus merveilleux que le précèdent. Car il y avait l'excitation du danger, le fait qu'ils n'aient qu'un temps limité.
Un temps plus limité qu'il ne le pensait. Il frémit en repensant à ce qu'il avait vu ce matin-là. Il avait mentit lorsqu'il avait dit qu'il avait appris ça que plus tard.

La vérité c'était qu'il n'était pas au courant du fait qu'elle ait été kidnappée par le maire. Comme tout le monde. Mais ce jour-là... Il était là.

Il avait quitté la maison et ouvert sa propre boutique de vêtement dans l'espoir de pouvoir s'émanciper de sa famille adoptive, et de pouvoir enfin vivre leur amour au grand jour. Il avait choisi des vêtements car Kira adorait porter de beaux habits, mais n'avait pas les moyens de faire des folies. Il voulait qu'elle porte les robes qu'il avait faites et pas celle des autres. Ouvrir sa boutique lui avait pris du temps et il n'était plus retourné chez ses parents adoptifs depuis une semaine. Kira était passée juste au début, le suppliant de lever le pied, mais il l'avait renvoyée chez elle. Un peu durement il devait le reconnaitre. Il avait bien vu qu'elle était repartie en colère et déçue de chez lui mais sans faire d'histoires. Mais elle devait comprendre qu'il faisait ça pour elle et pour personne d'autre. Aujourd'hui, tout enfin était calme et prêt, il s'était décidé à leur rendre visite.

Un bouquet de jonquilles jaunes en guise d'excuse pour Kira dans une main et un autre de roses bleues pour sa mère dans l'autre, il se dirigeait vers son ancienne habitation. Il vit alors un attroupement, près de la porte. On déposait quelque chose sur une charrette. Il était trop loin pour distinguer l'objet. Son oncle et sa tante avaient décidés de déménager ? Il s'approcha plus et surpris une conversation entre deux voisines tandis que l'on déposait autre chose dans la charrette

- Pauvre enfant, disait la première. Elle était encore jeune...

- Quel horrible chose, comment a-t-il pu faire ça à Kira ?

- Kaï ne va jamais s'en remettre... Perdre sa sœur et sa mère en même temps... Quel malheur pour cette famille

Perdre Kira ? Sur la surprise, il avait lâché les bouquets de fleurs. Les pétales se répandirent à ses pieds se mélangeant à la boue de la ruelle. Il resta là un moment jusqu'à ce que il vit Kaï à genou dans l'embrassure de la porte, pleurant et hurlant à la fois. Comme une bête que l'on égorgeait. Son père n'était pas dans un meilleur état, aussi pale qu'un linge, il regardait au loin, assis près de son fils. Choros ne pouvait plus supporter cette vision et fit demi-tour. Il courut longtemps sans s'arrêter, poursuivis par les cris de Kaï.

Kira ne pouvait pas être morte ! Ce n'était pas possible ! Pas Kira... Tout mais pas elle. Il avait fini par atteindre un point, en hauteur qui surplombait la ville. Sur cette colline, il y avait un arbre magique dont les feuilles ne tombaient jamais. Kira adorait cet arbre disant que c'était rafraîchissant de voir que quelque chose ne s'éteignait jamais. Il pria les dieux de prendre sa vie à la place mais de ramener Kira ! Elle ne pouvait pas mourir, elle était trop jeune. Il revit son merveilleux sourire, ses cheveux orangés si doux, qu'elle entretenait chaque jour avec tant de soin et qui sentaient si bon, qu'il aimait y fourrer son nez.

Il tomba à genou au pied de l'arbre et laissa exploser sa peine dans le plus grand secret. Exactement comme leur relation... Mais cette fois il était seul.

Ce jour-là, son cœur s'était brisé. Il n'avait plus jamais ressentit une telle chose envers qui que ce soit. Kaï le prenait pour un coureur de jupon et ne s'était jamais douté de leur relation. Il est vrai qu'il était très amical avec la gente féminine, mais son travail l'y obligeait. Même après la mort de Kira, il avait continué à coudre des vêtements, noyant son chagrin dans son travail. Il avait beaucoup de succès. L'inspiration, il la puisait dans ses souvenirs avec son aimée.

- La robe bleue était pour elle n'est-ce pas ? J'ai remarqué qu'elle était à part. Les coutures semblent vielles, ce n'est pas une nouvelle robe.

C'était encore une fois Alyssa qui avait posé une question. Comment avait-elle pu le remarquer, alors qu'elle venait d'arriver ? Dans sa boutique, il avait mis de côté sa plus belle création et sa toute première. Une robe qu'il avait faite spécialement pour Kira. Et pour personne d'autre. Il en était fier et il l'affichait afin de se souvenir des merveilleux moments qu'ils avaient passés ensemble. Il était sûr que ça allait lui aller à ravir, mais il n'avait jamais eu l'occasion de la voir sur elle.

Il hocha la tête en souriant amèrement. La Réincarnée était quelqu'un d'incroyable. Elle avait lu en lui, lui qui avait réussi à cacher son lourd secret, à tout le monde, pendant des années. Il la regarda, ne pouvant plus maitriser les larmes qui montaient en lui. Elle lui fit un pauvre sourire désolée et lâcha son ombrelle qui roula plus loin, emportée par le vent.

L'instant d'après, il pleurait dans les bras de la princesse sans retenu, à genou avec elle dans la poussière.

Et cette fois, il n'était pas seul.

La Lumière d'Asthéa : la Princesse DéchueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant